conditionnement évaluatif et activité physique

Conditionnement évaluatif et attitudes envers l’activité physique

Cet article fait référence à l’introduction du mémoire de Master 1 APAS parcours Sciences Technologies Mouvement de Rémy DADIER réalisé à l’Université de Montpellier (2021/2022) sous la direction de Julie BOICHÉ et Matthieu HAAS.

Titre du mémoire : Effet d’un conditionnement évaluatif sur les attitudes implicites envers l’activité physique

Les campagnes de santé publique utilisant des techniques de marketing social axées sur l’éducation peuvent être créditées de plusieurs réalisations notables au cours des dernières décennies, notamment le taux de maladies cardiovasculaires, la transmission du VIH et le tabagisme. Cependant, les experts ont fait valoir que la promotion de l’activité physique n’a pas reçu un investissement de ressources proportionnel à son importance sociétale”. (Ekkekakis et al. 2017)

Les avantages pour la santé de la pratique régulière d’une activité physique sont identifiés depuis de nombreuses années et la recherche contemporaine a confirmé cette croyance commune (Paffenbarger et al., 2001). 

Malgré cela, très peu d’adultes respectent les recommandations. De plus, les comportements en matière d’activité physique ne cessent de diminuer, particulièrement dans le contexte des maladies chroniques (Guthold et al., 2018 ; INSERM, 2019).

Récemment, plusieurs études ont révélé que des évaluations inconscientes envers l’activité physique nommées “attitudes implicites” sont positivement associées au comportement d’activité physique adopté (Chevance et al. 2019 ; Rebar et al., 2016).

De plus, il a été démontré qu’un changement de comportement en matière d’activité physique était possible en modifiant ces attitudes implicites, via une procédure de conditionnement évaluatif (Antoniewicz et al., 2016), une technique d’apprentissage qui vise à renforcer les associations entre un stimulus conditionné et non conditionné (Hofmann et al., 2010).

Toutefois, à ce jour, seulement quelques études ont appliqué une telle méthode au champ de l’activité physique. À notre connaissance, seules trois études portant sur un conditionnement évaluatif ont ciblé spécifiquement les attitudes implicites liées à l’activité physique.

Celles-ci restent limitées, car une seule des trois études a été menée hors laboratoire chez des patients présentant une maladie chronique (Chevance et al., 2019). De plus, les deux autres études présentent une absence de mesure des attitudes implicites initiales (Antoniewicz & Brand, 2016 ; Rasera et al., 2021).

L’objectif de ce travail était par conséquent d’évaluer l’effet d’un conditionnement évaluatif sur les attitudes implicites envers l’activité physique et en retour, sur les intentions d’être physiquement actif.

Activité physique

Activité physique et Santé

L’activité physique se définit comme “l’ensemble des mouvements corporels produits par la mise en action des muscles squelettiques, entraînant une dépense d’énergie au-delà de la dépense de repos dont l’intensité varie de faible à élevée” (Caspersen, Powell, & Christenson, 1985). 

Au cours des vingt dernières années, un grand nombre d’études épidémiologiques ont été menées dans le monde, analysant l’effet protecteur de l’exercice sur la dégradation de l’état de santé général (Paffenbarger et al., 2001). 

De nos jours, il existe en effet des preuves irréfutables de l’efficacité de la pratique d’une activité physique régulière dans la prévention primaire et secondaire de plusieurs types de maladies chroniques (i.e., les maladies cardiovasculaires, le diabète, le cancer, l’hypertension, l’obésité, la dépression et l’ostéoporose) ainsi que la mort prématurée (Warburton et al., 2017). 

À l’heure actuelle, les connaissances scientifiques sont suffisamment nombreuses pour permettre l’expression de recommandations précises en matière d’activité physique. 

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) préconise pour les adultes en bonne santé âgés de 18 à 64 ans d’accumuler au moins 150 à 300 minutes d’activité physique aérobie d’intensité modérée tout au long de la semaine, d’entreprendre au moins 75 à 150 minutes d’activité physique aérobie d’intensité soutenue tout au long de la semaine, ou d’effectuer une combinaison équivalente de ces deux formes d’activité physique (World Health Organization, 2021). 

Les directives existantes en matière d’activité physique se concentrent principalement sur des groupes cibles stratifiés par âge et en bonne santé. Parallèlement, pour les maladies chroniques, des recommandations plus spécifiques à chaque pathologie ont été formulées, afin de pouvoir encourager une activité physique appropriée à l’état de santé des individus (i.e., AVC, cancer, diabète, etc.).

Néanmoins, malgré la multiplication des preuves scientifiques et la vaste diffusion des informations relatives aux bienfaits de l’activité physique, les recommandations peinent à être respectées.

D’après Guthold et al. (2018), si le taux de personnes ne respectant pas les recommandations continuait d’augmenter, l’objectif fixé par les États membres de l’OMS (i.e., une réduction de 10 % de l’inactivité physique d’ici à 2025) ne serait pas réalisable.

Qui plus est, l’ambiguïté au niveau des termes à utiliser afin de caractériser le manque d’activité physique dans la population complexifie davantage la mise en place d’interventions efficaces[1]

Il est ainsi nécessaire de bien distinguer inactivité physique et sédentarité, deux comportements qui peuvent coexister chez un même individu et ayant un impact indépendant et non négligeable sur l’état de santé de la personne (Ekelund et al., 2016).

En effet, l’OMS estime que 3,3 millions de personnes meurent chaque année dans le monde à cause de l’inactivité physique, ce qui en fait la quatrième cause sous-jacente de mortalité (World Health Organization, 2009).

Étant donné que l’inactivité augmente le risque de plusieurs pathologies parmi les plus coûteuses pour les systèmes de santé (i.e., diabète de type 2, accidents vasculaires cérébraux, cardiopathies ischémiques, chutes et dépression), il n’est pas surprenant que celle-ci ait un coût conséquent en plus d’un lourd impact pour la santé.

Concrètement, on estime que 1% à 2,6% des coûts totaux des soins de santé dans le monde sont attribuables à l’inactivité physique (Pratt et al., 2014). Selon des estimations récentes, l’inactivité physique a coûté aux systèmes de santé internationaux 53,8 milliards de dollars dans le monde en 2013 (Ding, D et al., 2016).

L’amélioration continue de la surveillance de l’activité physique et l’élaboration de politiques et de programmes visant à augmenter les niveaux d’activité semble être une nécessité. Cela peut permettre de réduire le fardeau de l’inactivité physique et des maladies non transmissibles. 

L’un des enjeux majeurs est par conséquent de réussir à identifier les principaux déterminants jouant un rôle dans l’absence d’adoption d’une activité physique régulière. En effet, cibler ces déterminants permettrait, à terme, d’améliorer les stratégies de promotion d’activité physique déjà mises en place auprès de la population.

Toutefois, le maintien d’une pratique au fil du temps est un enjeu complexe susceptible d’être influencé par une multitude de facteurs (Bauman et al., 2017). Face à ce défi, les chercheurs reconnaissent de plus en plus la nécessité de faire appel à de nouvelles approches (Sheeran et al. 2017). 

Les travaux antérieurs suggèrent que l’identification de déterminants motivationnels de l’activité physique représente dans ce contexte un objet de recherche pertinent.

Activité physique

[1] Effectivement, “l’inactivité physique” et la “sédentarité” sont encore trop souvent confondus. Pourtant, ces termes renvoient à des profils de comportements différents. Dans le but de réduire cette confusion, le Sedentary Behavior Research Network (SBRN) a proposé, en 2012, une définition de la sédentarité comme étant “une situation d’éveil en position assise ou allongée” et de l’inactivité physique comme étant “un niveau insuffisant d’activité physique, c’est-à-dire n’atteignant pas le seuil recommandé par les sociétés savantes”.

Motivation et activité physique : des approches socio-cognitives aux modèles duaux

Pendant plusieurs décennies, la plupart des efforts mis en place en psychologie de la santé afin d’apprécier les comportements en matière d’activité physique étaient pour la plupart des approches socio-cognitives visant à comprendre et à expliquer le comportement humain de façon générale. 

Parmi les plus citées dans la littérature, la théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 1985), la théorie sociale cognitive (Bandura, 1986), ou encore la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991) incarnent les approches théoriques les plus populaires dans la littérature scientifique relative à la motivation envers l’exercice.

Ces modèles se concentrent principalement sur les déterminants cognitifs et comportementaux tels que les attentes en matière de résultats, la confiance en sa capacité à adopter le comportement, la formation rationnelle des intentions, et l’utilisation de stratégies d’autorégulation.

En ce sens, une partie importante des interventions conçues pour promouvoir la santé publique reposent généralement sur des cadres qui considèrent les individus comme des penseurs rationnels, et la prise de décision ainsi que les intentions comme des déterminants clés à l’origine de leurs actions.

Une méta-analyse incluant 206 articles confirme l’existence d’un lien significatif entre les croyances de l’individu sur les conséquences perçues d’un comportement de santé et son adoption, activité physique incluse (McEachan et al., 2011). La mise en place d’intentions s’avère donc être cruciale dans le but d’atteindre des objectifs sur le long terme.

Toutefois, tenter de comprendre le processus complexe de l’activité physique en ne se limitant qu’aux processus intentionnels est insuffisant. En effet, l’une des limites de ces approches est que les objectifs ne se traduisent pas toujours par des actions et que les personnes qui ont l’intention de pratiquer une activité physique échouent souvent à convertir leur intention en comportement réel (Sheeran et Webb, 2016). 

La modification de la pensée consciente ne garantit ainsi pas systématiquement le changement de comportement en matière de santé. Par ailleurs, de nouvelles preuves suggèrent que le comportement d’activité physique n’est pas seulement la manifestation des intentions et des raisonnements (i.e., la connaissance des conséquences d’une action ou la décision d’agir) de l’individu par rapport à l’activité physique.

Les comportements et les concepts que les individus associent mentalement et inconsciemment à l’activité physique (i.e., le plaisir ou le déplaisir ressenti pendant la réalisation d’exercices antérieurs) peuvent également influencer le comportement d’activité physique ultérieure (Rebar et al. 2016). Cette situation oblige à une réévaluation des modèles socio-cognitifs traditionnels. 

Ainsi, au-delà de ces processus explicites, liés à la raison des individus, les modèles contemporains questionnent des processus implicites ou automatiques. 

Ces modèles dits duaux tentent d’appréhender l’activité physique en proposant une distinction entre les attitudes “explicites” et “implicites”. Cette dichotomie est basée sur l’idée que l’Homme agit à la fois selon sa raison (processus explicites) et ses “pulsions” (processus implicites) (Deutsch et al., 2016).

Ainsi, les phénomènes comportementaux sont conçus comme les résultats de deux processus mentaux qualitativement différents. Le versant explicite, qui est assimilé à des cognitions dites “froides”, des évaluations issues d’efforts introspectifs et réflexifs, et le versant implicite, qui fait référence à des cognitions plus “chaudes”, des évaluations automatiques et impulsives dont l’individu peut ne pas avoir conscience (Hollands et al., 2011). 

Une étude d’Ekkekakis en 2017 portant sur l’émergence des modèles duaux suggère dans ce sens que l’hypoactivité chronique observée dans les populations soit la manifestation d’un conflit entre les attitudes implicites et explicites chez l’individu.

Concrètement, l’inactivité pourrait s’expliquer par une discordance entre des informations positivement évaluées sur les bienfaits pour la santé (attitudes explicites) et des expériences émotionnelles négatives (attitudes implicites).

À ce titre, des chercheurs en santé expliquent que l’adoption des nouveaux modèles duaux peut permettre à la recherche contemporaine en psychologie sociale de bénéficier d’une meilleure compréhension des aspects du comportement d’activité physique en exploitant à la fois les systèmes explicites et implicites – séparément mais aussi en interaction(Sheeran et al., 2013). 

cerveau et activité physique

Le rôle des attitudes implicites dans l’adoption d’un style de vie actif

Récemment, Brand et Ekkekakis (2018) ont formulé l’Affective-Reflective Theory (ART). L’objectif de ce modèle est d’expliquer pourquoi les personnes entreprennent ou non de faire de l’exercice.

Il suggère que l’évaluation automatique (ou attitudes implicites) de l’exercice et de l’inactivité physique (lié à une impulsion d’action immédiate) est la base à partir de laquelle des opérations affectives et cognitives ultérieures plus complexes (i.e, évaluation des croyances et des valeurs, la planification d’intention) peuvent se produire. Les évaluations automatiques correspondent ici à des évaluations non conscientes d’un concept (e.g., l’activité physique) basées sur des associations mentales avec des attributions valorisées telles que « bon »-« mauvais » ou « agréable »-« désagréable » (Rasera et al., 2021). 

Par son approche duale, l’ART propose donc d’enrichir les modèles antérieurs visant à la compréhension des comportements en matière d’inactivité physique, en y incorporant le rôle des attitudes implicites.

Elle met en avant le fait que dans certaines circonstances, la valence affective centrale (ressentie en permanence et caractérisant tous les états dans lesquels une personne se sent bien ou mal) peut avoir un impact direct et immédiat sur le comportement, et ce, par le biais de pulsions comportementales.

Elle suggère également que pour qu’un individu décide d’entreprendre un comportement actif, indépendamment de sa motivation à changer, la valence affective centrale associée à l’activité physique doit être plus positive que la valence affective associée à l’inactivité physique. 

Concrètement, une évaluation automatique favorable à l’exercice (i.e., une forte association mentale entre les concepts « exercice » et « agréable ») influencerait le comportement en se manifestant par des tendances d’approche impulsive vers l’exercice et inversement (Rasera et al., 2021).

On peut supposer que dans notre société contemporaine, une proportion importante d’individus, pour des raisons variées (e.g., surcharge pondérale, déconditionnement) ont associé l’activité physique au déplaisir. Ces diverses expériences désagréables peuvent provenir de leur incapacité à soutenir un effort dans le temps.

En pratique, les différentes conséquences associées à cette incapacité (i.e., essoufflement important, douleurs articulaires) vont renforcer collectivement les “marqueurs chargés négativement” associés à l’activité physique.

Ainsi, malgré une exposition répétée à diverses campagnes de sensibilisation sur les bienfaits pour la santé de l’activité physique, l’encouragement des professionnels de santé ou des engagements personnels, la plupart des individus ont tendance à se maintenir dans un style de vie inactif.

Au vu de ces éléments, la prise en compte des attitudes implicites pourrait alors permettre d’améliorer l’efficacité des stratégies de promotion d’activité physique actuelles.

En effet, une revue de littérature de Rebar et al. (2016), incluant 52 études, montre que l’activité physique est aussi partiellement déterminée par des attitudes implicites. D’après ces auteurs, les attitudes implicites influencent le comportement via des associations mentales préexistantes liées à l’activité physique (i.e., habitudes, associations automatiques, effets d’amorçage) prédisposant les individus à adhérer ou, au contraire, éviter certains comportements. 

De plus, une récente méta-analyse de Chevance et al. (2019), qui regroupe 24 études comportant à la fois une mesure des attitudes implicites et de l’activité physique, apporte des résultats en accord avec ceux de Rebar et al. (2016) et du modèle ART. 

Les données indiquent en effet que les attitudes implicites envers l’activité physique sont significativement associées au niveau d’activité physique (r = 0.11), que celui-ci soit auto-rapporté ou mesuré objectivement. Ainsi, les interventions en matière d’activité physique seraient susceptibles de pouvoir gagner en efficacité en considérant et en intégrant des stratégies visant à cibler les attitudes implicites. 

stratégie

Intervenir pour modifier les attitudes implicites : le rôle du conditionnement évaluatif

Compte tenu de leur nature, les attitudes implicites sont peu sensibles aux interventions “classiques” de type éducatives. Néanmoins, la découverte de brèves expérimentations (i.e., conditionnement évaluatif) influençant les attitudes implicites (à court terme) a permis aux chercheurs d’en apprendre plus à leur sujet. 

Le conditionnement évaluatif est un procédé qui consiste à modifier les évaluations automatiques en exposant les individus à des couplages répétés. Généralement, un stimulus non conditionné est couplé avec des stimuli conditionnés qui activent des évaluations positives (si l’objectif est de susciter des tendances à l’approche) ou négatives (si l’objectif est de susciter des tendances à l’évitement).

Dans cette procédure, le premier stimulus est souvent appelé “stimulus conditionné” (CS) et le second stimulus “stimulus non conditionné” (US). En général, un CS devient plus positif lorsqu’il a été associé à un US positif et plus négatif lorsqu’il a été associé à un US négatif.

C’est une forme de conditionnement pavlovien impliquant un changement dans l’appréciation du CS et amenant l’individu à son adhésion ou à son rejet (Hofmann et al., 2010). 

En raison de sa grande opérabilité et de son faible coût, Le conditionnement évaluatif a été largement utilisé dans le domaine clinique au cours des dernières années, notamment pour agir sur la toxicomanie, les idées suicidaires ou encore l’estime de soi.

Les résultats de la méta-analyse de Forscher et al. (2019) démontrent que le conditionnement évaluatif est une technique efficace afin de modifier les attitudes implicites dans différents contextes, y compris relatifs à l’adoption de comportements de santé tels que l’alimentation ou l’activité physique.

Par conséquent, la procédure de conditionnement évaluatif peut théoriquement être appliquée pour étudier les changements dans les attitudes implicites envers l’activité physique  (Qiu et al., 2020).

Ainsi, Antoniewicz et al. (2016) ont été les premiers à investiguer cette hypothèse à travers deux expérimentations. Dans la première étude, les participants (étudiants) ont été répartis de façon aléatoire dans un groupe APA (CE positif à l’AP), un groupe ANA (conditionnement évaluatif négatif à l’AP) ou un groupe témoin. Six CS liés à l’exercice et six CS non liés à l’exercice ont été utilisés (rectangles colorés comme stimuli neutres). 

Au total, 120 paires CS-US ont été présentées dans un ordre aléatoire. Puis, ils ont effectué un SC-IAT[1], un test visant à mesurer la force d’associations entre un concept (ici l’activité physique) et un attribut (bon ou mauvais). 

Les résultats démontrent que suite à l’expérience, les participants du groupe APA présentaient des scores d’attitudes implicites envers l’exercice plus favorables comparativement à ceux des autres groupes.

Dans la deuxième étude, les participants (étudiants) ont réalisé une tâche d’amorçage évaluatif afin de mesurer les attitudes implicites liées à l’exercice. Un tiers des participants a été assigné au hasard au groupe témoin.

Les autres participants ont été affectés au groupe APA si leurs attitudes implicites étaient négatives, et au groupe ANA si celles-ci étaient positives. La procédure du conditionnement évaluatif était similaire à celle utilisée dans l’étude 1, le seul changement notable était la diminution du nombre d’images par catégories, passant de six à quatre.

Concernant la tâche d’exercice, les participants ont été invités à choisir une intensité pour une courte période d’exercice sur ergocycle. Les résultats montrent que les participants du groupe APA ont choisi des intensités plus élevées que celles choisies par le groupe témoin. Cette recherche est la première à démontrer que le conditionnement évaluatif peut avoir un effet sur les comportements d’exercice ultérieurs.

Dans leur étude, Chevance et al. (2019) ont quant à eux mis en place un procédé écologique visant à modifier les attitudes implicites et in fine influencer le comportement en matière d’activité physique dans un contexte de réhabilitation respiratoire.

Une intervention a été développée à l’aide de posters, affichés dans la chambre des patients. Ces derniers étaient répartis en trois groupes expérimentaux : Un premier exposé à des posters représentant des personnes physiquement actives associées à des mots positifs; un deuxième à des posters représentant des personnes sédentaires associées à des mots positifs, et un dernier, contrôle, non exposé aux posters.

Quatre affiches différentes (une par jour) ont été utilisées. Les attitudes implicites ont été évaluées en pré et post-test à l’aide d’un IAT. Les participants pensant participer à une étude sur le sommeil et la réhabilitation étaient équipés d’un accéléromètre, ce qui a permis d’évaluer leur comportement en matière d’activité physique. 

Les résultats ne rapportent pas de changements significatifs, ni des attitudes implicites ni du comportement. Ainsi, l’exposition à des posters n’a pas eu d’impact sur les attitudes implicites ou les comportements en matière d’activité physique des participants.  

Plus récemment, Rasera et al. (2021) ont testé l’efficacité d’une application appelée “Flex”, intégrant des stratégies de gamification et de conditionnement évaluatif. L’objectif de l’étude était de tester si le fait de jouer à l’application influençait les évaluations automatiques de l’exercice immédiatement et un jour après. 

Deux versions ont été créées – une avec et une sans contenu d’exercice (Flex Exercise et Flex Control, respectivement). Les participants (population générale Australienne) étaient répartis de façon randomisée en deux groupes (groupe Flex exercice, Flex contrôle).

Après avoir joué, ils ont effectué un IAT en ligne. Vingt-quatre heures plus tard, ils ont été invités à effectuer une nouvelle fois cette évaluation. Les résultats ont révélé que la condition de l’application Flex Exercice n’a pas amélioré favorablement les évaluations automatiques envers l’exercice.

Par contre, le changement dans les évaluations automatiques a été plus favorable au comportement sédentaire dans le groupe contrôle, par opposition à une augmentation des scores (i.e., plus favorables à l’exercice) dans la condition Flex Exercise. 

Une interprétation possible est qu’avoir fait cette intervention via un jeu sur smartphone a pu contribuer à renforcer les attitudes de manière paradoxale (i.e., renforcer les attitudes implicites envers les activités plutôt sédentaires), même si cela pouvait être moins marqué quand le contenu était lié à de l’activité physique.

Cela reste spéculatif, car il n’y avait pas de mesures initiales des attitudes implicites. Malgré des résultats contraires à ceux attendus, cette étude représente une démonstration supplémentaire qu’il est possible de modifier les attitudes implicites, en engageant les utilisateurs dans des activités appréciées (i.e., le jeu sur application). 

Au travers de leurs résultats, ces différents travaux confirment donc la pertinence de considérer le conditionnement évaluatif comme une procédure susceptible de modifier les attitudes implicites envers l’AP, et en retour observer des changements comportementaux. 

cerveau

[1] un SC-IAT est IAT simplifié ne requérant le tri d’exemplaires appartenant qu’à trois catégories conceptuelles.

Objectif de l’étude et hypothèses

Dans la littérature, un ensemble d’études tend à confirmer l’association entre attitudes implicites et adoption de comportements actifs, dans diverses populations. D’autres travaux ont mis en évidence de façon consistante qu’une modification des attitudes implicites est possible à l’aide d’une procédure de conditionnement évaluatif.

Toutefois, les études menées dans le contexte de l’activité physique sont à ce jour très peu nombreuses et présentent des limites claires. En premier lieu, elles n’ont pas systématiquement réalisé de mesures des attitudes implicites initiales, ce qui ne permet pas de garantir que le conditionnement évaluatif a bien été accompagné d’une modification de cette variable.

De plus, certaines études ont été menées hors laboratoire, ce qui peut induire des biais liés au contexte dans lequel celles-ci se sont déroulées (i.e., attitudes implicites davantage influencées par l’environnement). 

L’objectif de ce travail était par conséquent d’évaluer l’effet d’un conditionnement évaluatif sur les attitudes implicites envers l’activité physique et en retour, sur les intentions d’être physiquement actif.  

H1 : Nous émettons l’hypothèse que les participants conditionnés de manière positive à l’activité physique vont présenter une augmentation plus importante du score d’attitudes implicites envers l’activité physique, comparativement au groupe contrôle – exposé à un conditionnement évaluatif ciblé sur l’alimentation. 

H2 : Nous émettons l’hypothèse que les participants du groupe expérimental (conditionnement évaluatif envers l’activité physique), soumis à un choix comportemental à l’issue de l’expérience, manifesteront une préférence plus forte pour un comportement actif,  par rapport à ceux du groupe contrôle (conditionnement évaluatif alimentation).

 

Pour rappel, l’article présente uniquement l’introduction du mémoire. Pour accéder au protocole, données ainsi qu’à la discussion du présent document, n’hésitez pas à vous adresser directement auprès de l’auteur.

Rémy Dadier

Rémy DADIER

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Références

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