Cet article fait référence au chapitre 1 du mémoire de ABBES Karrab réalisé durant son Master en faculté des lettres et des langues option didactique de FLE et du FOS (2016/2017)
Titre du mémoire : L’Evaluation de la compétence orale en classe de FLE Cas de 3ème année primaire
Sommaire
La notion de l’oral
Qu’est ce que l’oral?
Dans les méthodologies modernes, l’oral occupe une place importante et constitue le point de départ de l’apprentissage. Si nous avons bien compris la définition de l’oral selon le pédagogue Gérard Vigner, nous pouvons dire que l’oral désigne une situation d’échange d’un discours d’une manière constante. Pour lui, l’oral est l’autre forme de la langue, dans sa forme sonore, doté de priorités acoustiques particulières.
Il met en jeu la perception auditive et les capacités articulatoires du sujet. L’oral peut être donc conçu comme un échange de propos entre deux interlocuteurs d’une façon directe, ce qui permet l’intercompréhension en levant les ambigüités lors de l’échange, et cela met en jeu la capacité d’écoute et de production de parole des sujets parlant.
Les spécificités de l’oral
Le code oral est un moyen de communication. D’ailleurs, c’est le code le plus souvent utilisé. L’oral diffère de l’écrit par son ordre de réalisation et ses conditions de production. Il implique des relations, des interactions entre l’émetteur et le récepteur. L’oral s’acquiert d’une manière individuelle, ou l’apprenant s’entraine à maitriser des situations de communication orale en imitant les paroles de l’enseignant.
L’enseignant place alors les élèves dans des situations de communication orales réelles qui provoquent des phénomènes de divers ordres: langagier, para-langagier, psychologique, sociologique. Pour cela, les perspectives de l’oral dépassent la prise de parole pour englober le contexte de cette dernière.
L’oral, contrairement à l’écrit se caractérise par la spontanéité et l’invention. Ce qui pose problème au niveau de l’oral, c’est l’insuffisance du temps pour chercher des mots appropriés aux différentes présence des participants (locuteurs, interlocuteurs).
Le locuteur est en contact (auditif ou visuel) avec son interlocuteur, ce qui simplifier la compréhension et pousse l’interlocuteur à s’inscrire dans la communication, grâce aux gestes du locuteur, de ses regards et l’orientation de ses yeux vers l’interlocuteur lorsqu’il s’agit de la présence de plusieurs participants. L’oral donc, se caractérise par les marques énonciatives.
D’autre part, l’oral a pris une place de plus en plus importante dans les programmes. En effet, parler, cela s’apprend en écoutant et en parlant, tout simplement en pratiquant.
l’oral a toute sa place :
- Au cycle 1, le langage est au cœur des apprentissages.
- Au cycle 2, les Programmes insistent sur la maîtrise du langage oral.
- Au cycle 3, à travers le DIRE, il est une compétence transversale à toutes les disciplines mais l’oral doit aussi être travaillée pour lui-même en Littérature (« Dire les textes »).
Le langage oral est important pour la socialisation. C’est le premier outil de communication et d’échanges.
Pour Jérôme Bruner, le langage nous permet de mieux appréhender le monde et de construire des concepts .
Lev Vygotski nous a montré qu’il n’y a pas de développement de la pensée sans développement du langage oral et inversement .
Le langage oral est un outil pour penser et explorer la réalité. Il va permettre à l’enseignant d’accompagner et d’aider le langage de l’élève et par là-même sa pensée.
Il est un outil, un moyen d’action sur les choses (pour les décrire), sur autrui (pour demander, convaincre, expliquer, interroger, ordonner) et sur soi (s’exprimer, se défendre, se connaître soi-même). Parler ou dire, c’est oser se confronter aux autres, prendre toute sa place dans la société.
A l’école, le langage est à la fois un objet à construire – savoir utiliser le langage oral – mais c’est aussi un moyen d’acquérir des connaissances.
Les compétences de l’oral
Avant de commencer un travail sur l’oral, il est nécessaire d’appréhender toutes les compétences qui entrent en jeux.
Selon C. Mairal et P.Blochet ,il existe quatre compétences à acquérir pour un bon oral :
- Compétences communicationnelles.
- Compétences linguistiques.
- Compétences textuelles.
- Compétences discursives.
Compétences communicationnelles
Exprimer son désir de communiquer :
- Prendre la parole.
- Ecouter.
▪ Tenir compte de l’enjeu de communication.
▪ Tenir compte du lieu social et du lieu concret de la communication.
▪ Adapter sa voix (timbre, rythme, puissance, mélodie…) à la situation de communication.
▪ Etablir un contact charnel socialisé (degré de proximité des locuteurs, jeu des regards…).
▪ Adopter une attitude en fonction de la situation de communication (gestuelle, mimique, tenue vestimentaire, posture…).
▪ Savoir utiliser un matériel qui favorise la communication.
▪ Savoir faire évoluer l’échange langagier en fonction de la situation de communication. ▪Savoir faire fonctionner l’échange langagier en adaptant ses stratégies discursives à la situation.
▪Savoir tenir des rôles différents.
Compétences linguistiques
▪ Savoir respecter un axe de cohérence (poursuivre la même information, adapter le même point de vue).
▪ Savoir de quoi il est question.
▪ Savoir trouver les mots pour le dire.
▪ Savoir traduire ce dont il est question dans un registre de langue et dans un niveau de langage adapté.
▪ Savoir traiter l’information :
– la hiérarchiser
– la sélectionner.
– l’ordonner.
– l’organiser.
– adapter son niveau de complexité.
▪ Garder la même énonciation.
▪ Employer les outils linguistiques appropriés :
– les types de phrases.
– la complexité de la structure langagière.
– la complexité de la structure phrastique.
– les organisateurs et connecteurs traduisant les neuf notions fondamentales : comparaison, lieu, temps, cause, opposition, conséquence, condition, but, moyen.
– l’expression verbale du temps.
– le jeu des pronoms et des anaphores.
– la variété des interjections.
▪ Savoir reformuler ou diversifier des outils linguistiques.
Compétences textuelles
▪ Connaître le type d’oral :
– son enjeu.
– sa structure.
– son principe de fonctionnement.
▪ Savoir insérer des séquences textuelles différentes en fonction de l’enjeu d’oral choisi.
Compétences discursives
▪ La conduite narrative : être capable d’organiser des éléments dans le temps.
▪ La conduite descriptive : être capable de parler d’éléments organisés dans l’espace.
▪ La conduite explicative : être capable de donner des informations à quelqu’un qui n’est pas censé les connaître.
▪ La conduite argumentative: être capable de donner son point de vue, argumenter, convaincre.
▪ La conduite prescriptive (ou injonctive): être capable de faire faire quelque chose à quelqu’un (consigne orale).
▪ Interroger et demander : être capable de demander à quelqu’un une information.
Qu’est ce qu’une situation d’écoute?
Dans l’enseignement/apprentissage d’une langue étrangère, la compétence de la compréhension orale est motivée par une technique d’écoute.il s’agit d’écouter pour comprendre une information. Comme le confirme Jean-Francois MICHEL :
« la compréhension s’effectue principalement par l’écoute » .
L’enseignement du FLE doit adapter la compétence de la compréhension orale à des différentes situation d’écoute.il doit donc, faire apprendre à ses apprenants de varier la façon d’écouter en fonction d’un objectif de compréhension.
La compréhension orale définition et concepts Selon le dictionnaire de Jean Pièrre ROBERT, il existe cinq types d’écoute qui sont mis en œuvre, en fonction de l’objectif de compréhension:
écoute sélective
Apprendre à n’écouter que le(s) passage(s) qui est (sont) nécessaire(s) à la réalisation d’une tâche, apprendre à ’’ ne pas entendre’’ le reste.
écoute détaillée
Apprendre à prendre connaissance de tout ce qu’on veut écouter (dans un passage particulier, dans une catégorie d’informations, dans un discours oral). C’est une écoute exhaustive, de durée variable.
écoute globale
Apprendre à découvrir suffisamment d’éléments du discours pour en comprendre la signification générale.
écoute réactive
Apprendre à utiliser ce qu’on comprend pour faire quelque chose (prendre des notes, réaliser un gâteau, faire fonctionner un appareil, etc.). Ce type d’écoute nécessite de savoir mener deux opérations en même temps : il faut par exemple décider si les informations sont importantes, décider si l’auditeur doit intervenir sur le discours du locuteur (si l’interaction est possible), etc., tout en continuant à écouter.
écoute de veille
Ecoute automatique, sans réelle compréhension, mais qui fait place à une autre écoute dès qu’un mot ou groupe de mots déclenche un intérêt pour le discours. » ».
L’acte d’écouter n’est pas évident pour certains apprenants. Tout auditeur confronté à un problème de réception a pour premier réflexe de réécouter s’il le peut. Si cet acte est banal en langue maternelle, ce n’est plus le cas en langue étrangère. Il est important d’expliquer aux apprenants que le document proposé par l’enseignant dans la séance de compréhension orale n’est pas générateur de stress en soi, qu’il est inutile de l’envisager comme un ennemi.
Les différentes phases d’écoute
Selon les spécialistes, l’écoute est divisée en trois phases:
La première écoute
L’enseignant du FLE doit demander à ses apprenants de focaliser leur attention sur les détailles de la situation en répondant simplement à des questions du type : – Qui parle? A qui? Combien de personnes parlent? -Ce sont des hommes, des femmes ou des enfants, -Ou se passe la situation? Dans la rue, à la terrasse d’un café, en classe ou dans l’école? -De quoi parle-t-on? Ce type de questions peut aider les apprenants à la compréhension du document proposé.
Après cette première écoute, les apprenants répondent à ces questions et feront des hypothèses grâce à ce qu’ils ont entendu. La compréhension orale définition et concepts.
La deuxième écoute
Lors de la deuxième écoute, l’enseignant peut demander à ses élèves de vérifier leurs hypothèses et de répondre à des questions de structuration du discours. Il vont s’aider des articulateurs qui s’y trouvent, à titre d’exemples: des connecteurs logiques (d’une part, ensuite….), des marqueurs chronologiques ( d’abord, puis, premièrement… ) etc…
La troisième écoute
Cette dernière écoute permettra de confirmer ou d’infirmer les hypothèses que les apprenants ont formulées.
L’apprenant comme auditeur
La compréhension est une activité ou l’auditeur a une large part d’initiative. C’est aussi une activité très individualisée, puisqu’elle est la résultante de l’interaction entre un individu, différent de tous les autres, et une situation, différente de toutes les autres.
L’enseignement/apprentissage ne doit pas occulter ce phénomène.
L’apprenant, en tant qu’auditeur, doit être au centre du processus de compréhension. Il faut donc qu’il se trouve en position d’auditeur dans toutes les activités de compréhension proposées. C’est pourquoi il nous semble intéressant de distinguer deux phases dans l’enseignement/apprentissage :
Une phase systématique, où l’apprenant, grâce à des activités d’apprentissage qui ne sont pas toutes des situations de compréhension, ni même des situations de compréhension naturelle, acquiert de manière décomposée les différents savoirs et savoir-faire nécessaires,
Une phase communicative, où l’apprenant, placé dans des situations de compréhension communicative, peut assumer pleinement son rôle interactif d’auditeur et choisir une stratégie d’écoute (établir des hypothèses, choisir un type d’écoute), en s’appuyant sur les connaissances qu’il détient ou qu’il a acquises lors de la phase précédente.
Cependant un élément doit être commun aux activités proposées dans les deux phases : il est fondamental que les activités proposées comportent un objectif de compréhension clairement défini avant la réalisation de l’activité. Cet objectif sera la plupart du temps l’objectif de l’activité : il faut donc que l’apprenant connaisse cet objectif de travail.
La simple consigne «écoutez» ne place pas l’apprenant dans une position d’auditeur puisqu’elle ne lui permet pas de savoir pourquoi il doit écouter. Il faut donner à l’apprenant, ou lui demander de choisir, une bonne raison d’écouter.
La compréhension orale
Qu’est ce que comprendre?
La compréhension est défini dans le dictionnaire de Jean.P.Quq comme : « l’aptitude résultant de la mise en œuvre de processus cognitifs, qui permet à l’apprenant d’accéder au sens d’un texte qu’il écoute (compréhension orale) ou lit (compréhension écrite) » .
En didactique des langues, la compréhension est : « l’opération mentale de décodage d’un message oral par un auditeur (compréhension orale) ou d’un message écrit par un lecteur (compréhension écrite) » .
Encore, comprendre signifie, accéder au sens fondamental du document lu ou écouté.
Dans la perspective de l’enseignement/ apprentissage d’une langue étrangère, comprendre signifie que l’acquisition commence par l’écoute; la compréhension précède l’expression, ensuite la compréhension et la corrélation entre la réception et la production d’une langue étrangère méritent une attention particulière.
En psychologie, comprendre consiste à intégrer une connaissance nouvelle aux connaissances déjà existantes en s’appuyant sur les paroles ou les textes, ce qu’on appelle aussi entrés ou stimulus. Comprendre que ce soit par le support oral ou écrit, n’est pas une simple activité de réception plus ou moins passive comme on l’a souvent considérée, car dans tous les cas, il s’agit de reconnaitre la signification d’une phrase ou d’un discours et identifier leur(s) fonction(s) communicatives et construire leur sens.
A ce point, CHESNAIS Marie-Françoise affirme que «Le sens est indispensable a la vie et semble nécessaire aux êtres humains. Lorsqu’il nous échappe nous perdons toute raison de vivre, d’espérer, de combattre et nous nous sentons terriblement désorientes » .
La compréhension suppose la connaissance du système phonologique ou graphique et textuel, la valeur fonctionnelle et sémantique des structures linguistiques véhiculées, mais aussi la connaissance des règles socioculturelles de la communauté dans laquelle s’effectue la communication.
Sans oublier les facteurs extralinguistiques qui interviennent notamment à l’oral comme les gestes, les mimiques ou tout autre indice qu’un locuteur utilise inconsciemment.
De plus, toute situation de compréhension est spécifique étant donné le nombre de variables qui la constituent. Donc l’accès au sens est certainement un aspect délicat de l’enseignement d’une langue étrangère, car diverses composantes interviennent tant sur le plan de la perception que l’interprétation.
Qu’est ce que comprendre à l’oral?
Longtemps négligée, la compréhension de l’oral a retenu toute l’attention dans les années 1970 et a connu un rayonnement particulier avec l’entrée des documents authentiques dans la classe de langue. La volonté de mettre les apprenants aux contacts de diverses formes orales, diverses situations de communication, de proposer diverses stratégies de compréhension, a entrainé des études approfondies dans le domaine.
Selon le dictionnaire de didactique du FLE la compréhension orale se définit en linguistique comme : « suite d’opérations par lesquelles l’interlocuteur parvient généralement à donner une signification aux énoncés entendus ou à les reconstituer. »
La compréhension orale est l’une des étapes les plus fondamentales de la communication et dans l’acquisition d’une langue étrangère. La compréhension de l’oral ne se limite plus à des activités de discrimination auditive et les procédures méthodologiques différencient bien la compréhension de l’expression tout en favorisant l’interaction des savoirs et des savoir-faire requis pour développer telle ou telle compétence.
En outre, il s’agit d’une compétence qui engendre des difficultés au début de l’apprentissage d’une langue étrangère, pour les élèves mais également pour nous même, futurs professeurs de langue. Cette activité constitue la première compétence qui doit être développée chez les apprenants dans leur apprentissage d’une langue étrangère parce qu’elle vise à faire acquérir progressivement à l’apprenant des stratégies d’écoute au préalable. Ensuite, la compréhension d’énoncés à l’oral en second lieu.
Les objectifs de la compréhension orale
La compréhension orale est une compétence qui vise à former des auditeurs à devenir plus surs d’eux et plus autonomes. L’apprenant va donc réinvestir ce qu’il a appris en classe et à l’extérieur pour faire des hypothèses sur ce qu’il a écouté et compris. Il a dans son propre système linguistique des stratégies qu’il va tester en français.
L’élève va se rendre compte que les stratégies et les activités de compréhension orale vont l’aider à développer de nouvelles stratégies qui vont lui être utiles dans son apprentissage de la langue. En effet, comme il a montré DELL.H. Hymes:«L’apprenant sera progressivement capable de repérer des informations, de les hiérarchiser et de prendre des notes, en ayant entendu des voix différentes de celle de l’enseignant, ce qui aidera l’élève à mieux comprendre le français .»
A ce propos, Jean Michel DUCROT, dans son article qui s’intitule « l’enseignement de la compréhension orale, montre que les objectifs d’apprentissage sont d’ordre lexical et socioculturel, phonétique, discursif, morphosyntaxique…Pour lui les activités de la compréhension orale aide les apprenants à:
Découvrir du lexique en situation.
Découvrir différents registres de langue en situation.
-Découvrir des accents différents. -Reconnaitre des sons. -Repérer des mots clés. Comprendre globalement. -Comprendre en détails.
La compréhension orale en classe de FLE
Dans les exercices et les activités de compréhension orale, on développe des savoir-faire. L’un des premiers est la discrimination auditive. L’apprenant doit être capable de reconnaitre les phonèmes, leurs diverses combinaisons, et les frontières de mots. Le travail sur la prosodie entraine l’apprenant à repérer les courbes mélodiques, les modalités interrogatives ou exclamatives.
En outre, le terme compréhension orale recouvre essentiellement, dans les pratiques d’enseignement/ apprentissage d’une langue étrangère, l’accès au sens des énoncés. Les formes de travail proposées pour cela sont diverses parmi ces exercices il y a: QCM, questions ouvertes et questions fermées…
la production et l’expression orale
Le découpage traditionnel des activités en quatre aptitudes ou habiletés langagières (« skills ») pouvant être définies par le statut du locuteur (émetteur ou récepteur) et le médium utilisé (oral ou écrit) se traduit par une répartition en expression orale, expression écrite, compréhension orale et compréhension écrite qui mérite largement d’être affinée ou complétée.
Nous nous intéresserons ici à l’exemple de l’expression orale, à ce qu’elle recouvre et à la problématique qu’elle induit en termes pédagogiques. En effet, à notre sens, la parole n’est pas forcément synonyme d’expression orale et il convient de distinguer, au-delà même du cadre de l’enseignement des langues, la notion de production, ce terme étant à prendre dans son acception la plus stricte, voire restrictive, de celle d’expression.
Si ces deux termes sont généralement englobés par celui de « communication » (auquel on a parfois tendance à faire dire tout et n’importe quoi, soit dit en passant…), réfléchir sur la distinction pouvant exister entre les deux notions recouvertes nous aidera certainement à mieux nous situer vis-àvis des savoirs et savoir-faire à transmettre, à mieux définir nos objectifs et éventuellement à imaginer et à mettre en œuvre une progression ou une transition de l’une à l’autre.
Production doit être vu ici comme la simple émission de sons, de mots, de phrases… alors qu’expression sous-entend des énoncés qui impliquent (à des degrés divers, certes) leur émetteur. On peut donc dire que la production orale est incluse dans l’expression orale, puisque cette dernière exige l’émission de phonèmes organisés mais qu’elle est loin de la recouvrir entièrement.
Plutôt que de chercher à développer ici une quelconque querelle terminologique qui pourrait passer pour de la maniaquerie, il convient de voir comment cette distinction doit être prise en compte dans les classes de langue (français, anglais ou arabe), a fortiori si on garde à l’esprit que la finalité de l’apprentissage de ces langues est leur maîtrise complète, dans ce qu’elle a de plus complexe mais aussi de plus abouti, à savoir, à notre avis, une véritable expression.
On peut par conséquent essayer de dégager les critères et les indicateurs qui caractérisent la simple production orale en classe et les opposer à ce que devrait recouvrir l’expression si l’on prend ce terme dans toute sa plénitude, tous ses implicites et toutes ses composantes
PRODUCTION ORALE | EXPRESSION ORALE |
---|---|
Discours mémorisé | Discours spontané, voire improvisé |
Discours stéréotypé | Discours « libre » |
Discours collectif | Discours individuel / personnel |
Discours donnant la priorité au descriptif (« il ») | Priorité au discours impliquant son émetteur (« je ») |
Métalangage | Langue de communication |
Ecrit oralisé | Oral véritable |
Courbe intonative forcée et artificielle | Courbe intonative naturelle et expressive |
Priorité à la norme de la langue | Priorité au sens transmis |
Réponses à des questions fermées | Réponses à des questions ouvertes |
Réponses à des questions portant sur du lexique | Réponses à des questions portant sur des énoncés |
Communication uniquement linguistique | Communication « totale » (c’est-à-dire faisant appel à tous les aspects et à tous les outils de la communication) |
Réseau de communication privilégiant la place et le rôle de l’enseignant | Réseau de communication privilégiant la place et le rôle de l’apprenant |
Qu’on ne nous fasse cependant pas dire ce que nous n’avons pas dit : il ne s’agit pas de rejeter en bloc toutes les activités faisant appel ou référence plus ou moins directe aux points cités ci-dessus et correspondant à la simple production orale, mais il s’agit simplement de prendre conscience qu’on ne travaille pas dans le domaine de l’expression lorsque l’on fait appel à ce type de parole.
Si on s’interroge maintenant sur ce que devrait être une véritable expression orale, toujours en contexte scolaire d’apprentissage ou de perfectionnement linguistiques, on trouve au préalable quatre conditions nécessaires, voire indispensables pour qu’elle soit effectivement pratiquée :
- que l’élève (l' »apprenant ») ait quelque chose à dire.
- qu’il sache le dire.
- qu’il ait envie de le dire.
- qu’il ait l’opportunité / l’occasion de le dire.
Et si l’on décline ces quatre conditions, on retrouve en fait les principales questions que l’on doit se poser si l’on souhaite favoriser et privilégier une véritable expression orale. Notons d’ailleurs que ces conditions et les principes qu’elles sous-tendent sont totalement transférables dans le domaine de l’expression écrite.
Que l’élève ait quelque chose à dire
Cette condition suppose que le thème retenu soit motivant et/ou appartienne au vécu de l’enfant, surtout en ce qui concerne les petites classes. On peut aussi réfléchir sur d’éventuels supports à proposer à l’élève pour enrichir ou étayer son discours.
Ainsi, si nous prenons l’exemple du jeu de rôles, on peut soit proposer uniquement un canevas situationnel, soit accompagner la situation d’un document écrit ou oral, authentique ou fabriqué, et à l’intérieur duquel les élèves pourront piocher des informations, des arguments, des idées etc.
Précisons que ce support serait à coup sûr perçu par certains apprenants comme une aide et un guide alors que d’autres y verraient avant tout des contraintes et un carcan.
Varier les pratiques semble être la meilleure solution dans la perspective d’une pédagogie non répétitive et visant à développer l’ensemble des compétences tant strictement linguistiques que plus transversales.
Qu’il sache le dire
Qu’il sache l’exprimer serait d’ailleurs plus correct car il est bien connu que l’expression va bien au-delà de la parole et que la communication non-verbale (kinésique, mimiques, intonations…) est parfois au moins aussi importante que les mots (qu’est-ce que l’ironie, par exemple, si ce n’est démentir par l’intonation ou la prise en compte du contexte le strict discours produit ?).
Si la communication présente ou peut présenter un aspect linguistique, soulignons en effet que la communication ne se limite pas aux mots et nous rappelons ici les quatre niveaux que l’on peut définir dans la communication non-écrite :
- la communication non-verbale (kinésique, proxémique, mimiques etc.)
- la communication « non-construite » (et généralement réfutée par l’enseignant de langue qui exigera « des phrases complètes » exigence leitmotiv trop souvent entendue…)
- la communication « non-normée », ou en tous cas ne correspondant pas aux normes de correction de la langue.
On peut d’ailleurs remarquer que, dans la mesure où il n’existe pas de norme spécifique à l’oral, c’est la norme de l’écrit , le « Bon usage », qui seul prévaut dans ce domaine, bien que bon nombre d’énoncés produits par des francophones (natifs ou non) transgressent allègrement ces règles.
Des phrases comme J’sais pas…, Tu crois pas ? ou des malgré que… n’en sont que des exemples facilement repérables, mais certains écarts entre les codes écrit et oral peuvent être à la fois plus importants et moins immédiats. Exemple:
écrit : nous partirons demain matin.
oral : on va partir demain matin.
On constate ainsi que la distinction entre l’écrit et l’oral va beaucoup plus loin que le degré de tolérance à l’encontre de quelques règles de grammaire mal ou non appliquées. Il va de soi que, pour la plupart des enseignants, ces énoncés ne sont pas tolérés (ne parlons même pas d’acceptation).
La communication verbale, construite et normée. Si elle existe, elle est « quantitativement » marginale dans les échanges authentiques de type informel, mais c’est pourtant, dans la plupart des cas, le seul type de communication que l’enseignant acceptera de ses élèves.
On se retrouve par conséquent dans une situation où l’on est beaucoup plus exigeant avec des enfants apprenant la langue qu’on ne l’est avec des adultes dont c’est la langue maternelle. C’est peut-être ce qu’on appelle être plus royaliste que le roi…
Qu’il ait envie de le dire
Se posent ici des questions relatives à la motivation de l’enfant et il faut reconnaître que celle-ci, bien souvent, est étroitement liée au comportement de l’enseignant qui doit savoir d’une part susciter les interventions et d’autre part faire en sorte que la parole entraîne la parole.
Un des principes relatifs à cette idée est de ne jamais interrompre un élève qui parle, même s’il commet des erreurs. Celles-ci (ou tout au moins celles qui le méritent il reviendra à l’enseignant de juger) feront l’objet d’une correction et d’un traitement ultérieurs.
Ne pas confondre les étapes d’expression et de travail sur la langue nous semble primordial dans l’optique d’une prise de parole plus vraie, plus naturelle et plus « décontractée ».
Qu’il ait l’occasion / l’opportunité de le dire
Deux conditions paraissent ici essentielles :
- que l’enseignant propose effectivement des activités induisant une véritable communication.
- que la répartition des temps de parole permette à tous ceux qui le souhaitent de s’exprimer.
Si nous avions ici un conseil à donner aux enseignants, il serait le suivant : Apprenez à vous taire, même si vous devez pour cela forcer votre nature… Ce n’est qu’à cette condition que les élèves saisiront et s’approprieront la parole.
Dans le même ordre d’idée, on évitera dans la mesure du possible la frustration pouvant se faire jour chez des élèves auxquels on n’a pas donné la parole alors qu’ils levaient la main, signifiant ainsi qu’ils souhaitaient dire quelque chose.
À terme, ils risquent en effet de ne même plus chercher à intervenir s’ils ont l’impression que, de toutes façons, on ne leur donnera pas la parole.
Les supports utilisés
La bande dessinée
La BD est un document authentique des plus vivants et des plus motivants qui offre différents atouts. Les bandes dessinées, en tant que documents authentiques, permettent aux enseignants de FLE d’effectuer un travail bénéfique et positif pour les apprenants; ils permettent d’allier apprentissage et créativité.
Leur aspect ludique et leur richesse (culturelle, lexicale et grammaticale) favorisent une manière de travailler différente, en classe et avec les apprenants. De plus, la langue de la BD est une langue de tous les jours, qui de par son style conversationnel (avec des registres de langue différents), permet de travailler sur des situations variées.
Les supports audio
L’enseignant du français langue étrangère peut utiliser en classe plusieurs supports. Il peut apporter à ses apprenants des cassettes ou des CD enregistrés par des natifs ou des francophones, ou des documents sonores authentiques en français. L’enseignant peut aussi fabriquer son propre matériel didactique selon son objectif du travail.
Il s’agit dans ce cas d’enregistrer à la radio des entretiens, des flashs d’informations, des chansons, des annonces et des publicités… il peut aussi faire ses propres enregistrements en fabriquant un dialogue, sur une situation de la vie réelle parfaitement authentique.
Dans ce cas, il faut faire attention aux critères qui vont suivies déterminent la qualité pédagogique d’un bon document sonore. Par exemple: il ne faut pas négliger: -La qualité du son. -La durée de l’enregistrement (ni trop court, ni trop long en fonction du niveau des apprenants).
Pour plus d’informations sur ce mémoire, n’hésitez pas à vous adresser directement à l’auteur ci-dessous.
ABBES Karrab
Livres pour approfondir
L’évaluation formative – Laurent Talbot
L’évaluation formative, un processus d’évaluation continue, permet à l’enseignant et à l’élève de savoir à tout moment où en sont les constructions de connaissances, d’identifier les éventuelles difficultés et de réguler les pratiques d’enseignement ou d’apprentissage en conséquence.