Cet article fait référence à l’introduction du mémoire de Master 2 Entrainement et Optimisation de la Performance Sportive de Jordan MONTET réalisé à l’Université Claude Bernard Lyon 1 (2021/2022) sous la direction de Sébastien SANGNIER.
Titre du mémoire : Comparaison de l’effet d’un entrainement en pliométrie et d’un entrainement en contraste de charge sur les performances de sauts et de changement de direction en fonction des profils aériens/terriens
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Sommaire
Analyse de l’activité
Lors d’un match de football professionnel, la distance parcourue par les joueurs de champ varie de 10 425m à 12 029m. Entre 4,1% et 5,4% sont parcourus à une vitesse supérieure à 21 km/h. La distance en sprint (course supérieure à 24km/h) représente entre 1,9% et 2,7% de la distance totale.
Ces caractéristiques de la demande physique varient en fonction du poste, les milieux de terrain sont les joueurs qui parcourent la plus grande distance (entre 11 501m et 12029m), les milieux excentrés et les milieux offensifs présentent les valeurs de course à haute intensité (course entre 21 et 24km/h) les plus élevées (respectivement en moyenne 335,7m et 334,6m par match) mais ce sont les attaquants axiaux qui parcourent le plus de distance en sprint (course supérieure à 24km/h) : 290,4m.
La répartition de cet effort est dépendante de la possession ou non du ballon, 66% de la distance en sprint est réalisée par les attaquants axiaux à lieu lorsque leur équipe est en possession du ballon, soit environ quatre fois plus que les défenseurs centraux qui eux réalisent la majorité de leurs sprints lorsque leur équipe n’est pas en possession (Dellal et al., 2010).
Il a été démontré également que les équipes les moins performantes ont une distance de course sans ballon plus importante (distance totale : + 4% ; course à haute intensité : + 11% ; sprint : + 9%) et une distance de course avec ballon moins importante (distance totale : -18% ; course à haute intensité : -16% ; sprint : – 14%).
Les efforts sont, de plus, inégalement répartis au cours d’un match. En moyenne, les joueurs parcourent 2% de distance totale, 7% de course à haute intensité et 7% de sprint en moins entre la première et la seconde mi-temps.
De la même manière, la distance totale avec le ballon et la distance à haute intensité avec le ballon est moins importante en deuxième mi-temps (respectivement -5% et 9%) (Rampinini et al., 2007). Il y a donc une diminution de l’intensité au fur et à mesure de l’avancée du match.
Une évolution au cours du temps
Ces demandes physiologiques ont évolué dans le temps et le football requiert dorénavant d’être capable de répéter de nombreuses courses à haute intensité. Barnes et ses collaborateurs ont démontré qu’entre la saison 2006-2007 et la saison 2012-2013, la distance à haute intensité a augmenté de 29.3% et la distance en sprint de 50,8%.
Leurs résultats témoignent également d’une augmentation des efforts explosifs, le nombre de sprint a augmenté (31±14 en 2006 contre 57±20 en 2013) et la distance moyenne de ces derniers a diminué de 14.5%.
Une augmentation de la proportion des sprints explosifs a été observée (34±11% en 2006 contre 47±9% en 2013) (Barnes et al., 2014).
L’une des actions explosives les plus récurrentes en football est le changement de direction (COD). En moyenne, 727 COD sont réalisés par un joueur au cours d’un match. La grande majorité de ces COD ont une angulation comprise entre 0 et 90° (environ 600 par match).
Le nombre et l’angulation des COD diffère en fonction des postes et des demandes qu’ils requièrent, on peut observerez que les milieux de terrain sont les joueurs réalisant le moins de changements de direction par match (environs 600, contre 700 pour les attaquants et 800 pour les défenseurs), c’est également le poste auquel les joueurs réalisent le moins de COD compris entre 0 et 90°.
Les défenseurs ne réalisent jamais de changements de direction à 270°-360°, à l’inverse des attaquants et des milieux de terrain qui peuvent avoir recours à ce type de déplacement pour se sortir du marquage adverse ou pour créer un espace.
Les nombres de COD entre 90° et 180° sont eux relativement égaux entre les postes et représentent entre 90 et 100 COD par match. (Bloomfield et al., 2007).
En raison de sa récurrence, il est important pour les préparateurs physiques en football d’analyser les facteurs influençant la performance de ce mouvement.
Les facteurs de performance en changement de direction
Selon Young est ses collaborateurs, les qualités de changements de direction sont déterminées par trois facteurs : la technique (qui englobe le placement des pieds, l’ajustement de la foulée lors de l’accélération et de la décélération et la posture et l’inclinaison du buste), la vitesse de sprint en ligne droite et les qualités musculaires des membres inférieurs (la force, la puissance et la force réactive).
La relation entre la vitesse en ligne droite et la performance en COD a été analysée par Gabett et ses collaborateurs.
Ils ont observé des corrélations significatives (r allant de 0,52 à 0,73) entre les tests de vitesse en ligne droite (5m, 10m et 20m) et plusieurs tests de changements de direction (505 test, 505 test modifié et le Lrun) (Gabbett et Sheppard, 2008).
La relation entre la force et les qualités de changements de direction a elle été analysée par Nimphius et ses collaborateurs.
Ils ont observé que la masse corporelle et la force relative avaient une très forte corrélation avec la vitesse et la performance en COD et que ces corrélations restaient stables au fil de la saison sportive (Nimphius et al., 2010).
Enfin, pour un changement de direction à 180° efficace, Hewit et ses collaborateurs ont proposé cinq clés techniques :
(1) premièrement, le déclenchement du mouvement du centre des masses (CdM) dans la direction du sprint prévue. Lors de cette phase, le corps commence à transférer l’élan vers l’arrière à l’aide d’une flexion légère flexion de hanche et de genou qui va permettre d’appliquer une force verticale et horizontale dans le sol lors de la poussée. Cette légère flexion permet également de générer une force plus importante via le cycle étirement/raccourcissement.
(2) La rotation de la tête pour diriger le corps. La rotation de la tête pour amorcer un COD présente deux avantages : premièrement, elle permet une prise d’information dans la nouvelle direction (position des coéquipiers, adversaires, …). Deuxièmement, la rotation de la tête va permettre d’entrainer la rotation des épaules, du torse, des hanches et des jambes.
(3) Avoir une petite inertie de rotation. L’inertie de rotation dépend de la répartition de la masse autour de l’axe de rotation, par conséquent garder les bras et les jambes proche de l’axe de rotation du corps (le pied pivotant) permet aux joueurs de tourner plus vite.
(4) Une extension complète dans la direction du sprint lors de la poussée. Une extension complète de la jambe comprenant l’extension de cheville, de genou et hanche permet d’appliquer une force au sol plus importante et par conséquent une plus grande efficacité de mouvement. En revanche, si le COD est suivi d’autres COD cela peut être un désavantage car la jambe avant sera en l’air pendant une plus longtemps ce qui empêchera l’athlète de modifier sa trajectoire.
(5) Une amplitude importante lors du premier appui. Une longueur de pas importante lors du premier appui est bénéfique pour une accélération accrue. De plus, il faut que l’appui soit parallèle à la nouvelle direction (Hewit et al.,2012).
Ces 5 clefs techniques sont applicables uniquement sur des COD de 180° ou plus mais un COD avec une angulation plus faible peut avoir des caractéristiques différentes qui vont obliger l’athlète à avoir recours à d’autres organisations corporelles pour être le plus performant possible.
Analyse des changements de direction
L’analyse biomécanique d’un COD est complexe car l’angulation de ce dernier peux faire varier l’organisation motrice de l’athlète.
Nous pouvons tout de même décrire trois phases que nous retrouvons dans tous les COD : Tout d’abord, il y a la phase préliminaire de décélération.
Lors de cette phase, l’athlète va entrer en contact avec, en premier lieu, avec le talon en amont du corps qui va être suivi par une flexion plantaire afin de permettre à l’intégralité du pied de rentrer en contact avec le sol.
Par la suite, le buste devient plus droit est on observe une dorsiflexion du pied jusqu’à ce que le tibia dépasse la verticale.
La flexion de genou va compenser la dorsiflexion de cheville pour permettre au centre des masse de se rapprocher de l’appui, la force des muscles quadriceps et gastrocnémiens permet de produire la force de décélération.
La deuxième phase et la phase de positionnement de l’appui et de rotation. La pose de l’appui permet de finaliser la décélération, la rotation de hanche permet d’orienter le torse vers la nouvelle direction.
La jambe libre se balance vers la nouvelle direction pour initier la nouvelle accélération. Lorsque la jambe au sol a complété sa décélération, la hanche et le torse ont terminé de tourner.
La suite du mouvement dépend de la technique de COD utilisée et sera conclue par la dernière phase qui est la phase de poussée.
Trois techniques de COD ont été majoritairement étudiées dans la recherche scientifique : le side-step, le crossover step et le split step. Une représentation de ces trois techniques est à retrouver dans la figure suivante :
Lors du side-step, le joueur aborde le COD avec le corps droit, le bassin déjà fléchi et le genou de la jambe d’appui en extension.
Durant la décélération le torse et le pelvis sont tourné vers déjà tourner l’intérieur. Cette rotation va permettre à la jambe libre d’accélérer dans la nouvelle direction. À ce moment-là, le fémur de la jambe d’appui est légèrement en rotation externe et le genou a une flexion d’envions 60° et le pieds est en dorsiflexion. Le phase de poussée est par la suite déclenché par l’extension de la hanche, du genou et de la cheville de la jambe d’appui. Avec cette technique, c’est la jambe controlatérale qui sera la jambe d’appui lors du COD.
Lors du crossover step, le joueur réalise le changement de directions différemment. Ici, le buste et le bassin sont en rotation externe par rapport au fémur de la jambe d’appui. Après la rotation de la hanche et du buste, il y a une rotation interne et une adduction de la jambe libre pour lui permettre de contourner la jambe d’appui et de pouvoir se balancer dans la nouvelle direction.
Avec cette technique, c’est la jambe ipsilatérale qui sera la jambe d’appui lors du COD. Enfin, lors du split step, le joueur termine la décélération par un léger saut vertical avant de pousser avec la jambe controlatérale de la même manière que lors du side-step. Ce petit bondissement peut permettre de surprendre un adversaire et de générer une force de réaction au sol plus importante grâce à l’activation du cycle étirement-détente.
Implications biomécaniques propres
Ces différentes techniques des implications biomécaniques différentes, selon Dos Santos et ses collaborateurs, permettent de réduire le risque de blessure et d’optimiser la performance lors d’un COD, il est préférable d’utiliser le side step pour les COD avec un angle compris entre 45 et 180° tandis que le cross over step serait plus efficace pour les COD avec un angulation de 0° à 45°.
En raison du bondissement qui caractérise le split step, il semble difficile d’utiliser cette technique pour réaliser des COD avec un angle supérieur à 90°. Cette technique semble également moins efficace que cross over step pour les COD avec une angulation faible.
Dos Santos et ses collaborateurs se sont également intéressés à l’impact de l’angle du COD sur la biomécanique du sportif.
Ils ont relevé 6 éléments qui sont influencés par l’angulation du COD :
(1) la force de réaction au sol. La force de réaction au sol et le temps de contact au sol sont plus élevés lorsque l’angle du COD est élevé. Par exemple, la comparaison d’un COD à 110° et un COD à 45° a démontré des forces de réaction au sol verticales, postérieures et latérales plus importantes pour le COD à 110°, respectivement plus 21%, 87% et 228%.
(2) La vitesse du centre des masses et besoin de décélération. Un angle de COD plus important implique une vitesse d’approche et de sortie plus faible et une distance de freinage plus importante.
(3) La cinématique et la cinétique des articulations. D’après Havens, la répartition des forces lors d’un COD à 90° et plus n’est pas uniforme et l’articulation du genou est la plus sollicitée, ce qui peut augmenter la force de cisaillement tibial antérieure et donc la charge sur le ligament croisé antérieur. De plus, un COD avec un angle important implique une abduction de hanche, une inclinaison du tronc et une adduction de hanche plus importantes lors de la rotation (Havens et Sigward, 2015).
(4) Augmentation de la charge relative du bas du corps. Un COD important implique un angle de valgus du genou plus important et des angles de flexion de genou plus faibles.
(5) Effet sur l’activation musculaire et la dépense énergétique. Il a été reporté que la dépense énergétique et l’activation musculaire été plus importante lors des COD avec un grand angle. Les muscles quadriceps et Ischios jambiers ont une activation très importante lors COD, il est nécessaire de les renforcer pour prévenir toutes lésions lors d’un COD important.
(6) Le temps de contact au sol. Il augmente avec l’angulation du COD en raison d’un besoin de freinage et de propulsion plus important pour modifier son déplacement (Dos Santos et al., 2018).
Les préférences motrices : terriens et aériens
Lorsqu’un groupe de sportif cours, nous pouvons observer qu’ils n’adoptent pas tous la même organisation motrice pour se déplacer.
Pour simplifier l’analyse du mouvement d’un sportif lorsqu’il court, Gindre et ses collaborateurs ont proposé une méthode permettant de placer les individus sur un continuum pour évaluer leur organisation motrice. Les deux bornes extrêmes de ce continuum sont les profils terriens et les profils aériens (Gindre et al., 2015).
D’après Lusiana, les coureurs aériens possèdent un temps de contact au sol faible, un temps de vol important, une oscillation du centre des masse dans l’axe vertical importante et une raideur musculaire des membres inférieurs importante.
À l’inverse, les coureurs terriens ont lors de la course un temps de contact au sol plus important, un temps de vol plus faible, une plus faible oscillation du centre des masse et une raideur des membres inférieurs beaucoup moins importante que les coureurs aériens.
Il existe également des différences au niveau musculaire, il a été démontré que les profils aériens présentent un pic d’activation plus précoce du chef latéral du muscle gastrocnémien mais également un pic d’activation plus tardif du muscle tibial antérieur que les profils terriens.
Caricaturalement, nous pouvons schématiser le coureur aérien comme étant une personne qui rebondit lorsqu’elle court et un coureur terrien comme une personne qui rase le sol lors de la course. Le coureur aérien se déplace selon le modèle masse-ressort, il utilise l’énergie élastique de ses muscles pour se propulser vers l’avant ce qui implique un déplacement vertical du CdM important et une activation importante des chaines musculaires d’extension.
Ce modèle ne peut s’appliquer aux profils terriens qui posent leurs appuis en amont de leurs CdM, avec ce modèle, il serait impossible pour eux de se déplacer vers l’avant.
En effet, le coureur terrien utiliserait un modèle de déplacement diffèrent dit de « poulie » pour se déplacer vers l’avant. Ils diminuent l’énergie verticale et augmente l’énergie horizontale en en augmentant le temps de contact au sol en passant plus de temps sur l’appui, en utilisant un angle de pose de pied plus élevé, en réduisant l’angle de leur genou lors de l’appui et en réduisant l’oscillation de leur CDM.
Selon ce modèle, leur déplacement du CDM serait plus horizontal que celui d’un coureur aérien et serait créé par une activation plus importante des chaines musculaires de flexion et une activation musculaire en poussée (concentrique) qui leur permettrait de se propulser vers l’avant (Lussiana et al., 2016).
Selon cette approche, les coureurs aériens agissent en rebond sont plus familiers et plus réceptifs à des mouvements pliométriques alors que les coureurs terriens sont plus à l’aise dans des mouvements de poussée.
Orientation des recherches
Dans cette étude nous allons cibler l’amélioration des qualités musculaires dans l’objectif d’améliorer les qualités de COD puisque comme cela l’a été démontré par Young en 2002, les qualités de changements de direction sont dépendantes des qualités musculaires (Young et al.,2002).
Pour améliorer les qualités musculaires des sujets nous allons utiliser deux méthodes : le contraste de charge et la pliométrie.
Ces choix ont été réalisés en raison des deux modèles de déplacements détaillés plus haut : l’entrainement pliométrique permettra à l’athlète dit aérien de travailler selon son modèle préférentiel et inversement pour l’entrainement en contraste de charge pour les coureurs terriens.
En effet, il a été démontré que ces deux types d’entrainements permettent d’améliorer les qualités musculaires des sportifs :
-Hammami et ses collaborateurs ont démontré qu’un entrainement en contraste de charge permet d’améliorer les performances en squat, la force et la puissance générées lors d’un squat jump. Cette méthode permet également d’améliorer les performances en sprint (10m, 20m, 30m et 40m) (Hammami et al., 2017).
– Deuxièmement, McCornick a démontré qu’un entrainement pliométrique permet d’améliorer la puissance des membres inférieurs, les performances dans différentes modalités de sauts et les performances en COD (McCormick et al., 2016).
Objectifs
À travers cette revue de littérature, nous pouvons observer que les efforts à hautes intensités occupent une place de plus en plus importante en football.
Le changement de direction est l’une des actions explosives les plus réalisée lors d’un match, une exécution optimale de ce mouvement est donc essentielle pour les footballeurs de haut niveau. Dès lors, il est nécessaire pour les préparateurs physiques en football et les préparateurs physiques d’autres sports multidirectionnels de connaitre parfaitement les déterminants de la performance de ce mouvement.
Ce mémoire s’intéresse au développement de la force musculaire et a pour objectif de comparer quel type d’entrainement entre un entrainement en contraste de charge et un entrainement en pliométrie permet d’améliorer aux mieux les qualités de sauts et de changements de direction chez les jeunes footballeurs d’élite.
Dans un second temps, nous observerons s’il existe une relation entre les profils terriens / aériens et des gains de performance plus importants entre l’une ou l’autre méthode de développement de la force.
Pour télécharger le mémoire de Jordan en intégralité :
Jordan MONTET
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