Cet article fait référence à l’introduction du mémoire de Master 1 Entrainement et Optimisation de la Performance Sportive de Corentin Pic réalisé à l’Université de Montpellier (2021/2022) sous la direction de TEYSSIER Patrick.
Titre du mémoire : Effets de divers entrainements en développé couché sur la vitesse de tir en handball
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Sommaire
Introduction
Le handball est un sport collectif dans lequel deux équipes de sept joueurs s’affrontent. Les deux équipes se disputent un ballon, qu’ils doivent envoyer dans une cible (le but) protégée par une ligne défensive, et une zone à laquelle seul le gardien peut accéder.
Le handball est un sport qui requiert de nombreuses qualités physiques (la force, la puissance, la vitesse ou encore l’endurance).
Un match de handball est composé de deux périodes de trente minutes de jeu, au cours desquelles les joueurs alternent entre des phases d’attaques placées, de contre-attaques et des phases défensives.
Spécificités selon les phases de jeu
Toutes ces actions ne se font pas à la même intensité. En 2020, des chercheurs ont quantifié les différences d’effort entre ces différentes phases de jeu (Manchado et al., 2020).
Leurs résultats ont montré que les distances moyennes parcourues par les différents postes étaient similaires : 1388 m +/- 2627 m pour l’attaque et 1305 m +/- 5059 m pour la défense. Ces distances sont parcourues en moyenne en 15 min 41 sec pour les phases d’attaques et en 15 min 24 sec pour les phases de défense.
Cependant, lorsque Manchado et collaborateurs ont normalisé le temps passé sur le terrain par la distance couverte par le joueur, ils ont trouvé des différences significatives pour les phases de défense par rapport aux phases d’attaques.
Les joueurs marchent 20% de plus en défense que pendant les phases d’attaques. C’est également en défense qu’ils effectuent le plus de course à haute intensité (+25,2%).
Au contraire, les phases de jogging sont 29,6% supérieures lors des phases d’attaques comparativement aux phases de défense.
Ces différences s’expliquent par le fait que c’est l’équipe en attaque qui dicte les actions des défenseurs. En effet, les attaquants cherchent à déplacer les défenseurs afin de créer une zone d’accès à la cible, pour marquer un but dans les meilleures conditions possibles.
Pour cela, les attaquants effectuent des courses plus longues mais de plus faibles intensité, là où les défenseurs doivent moins se déplacer mais en moins de temps pour venir bloquer l’attaquant adverse.
Spécificités selon le poste
Les différences ne se limitent pas simplement aux distances à parcourir entre les deux phases de jeu.
En effet, dans cette même étude Manchado et collaboratueurs (2020) ont montré qu’il existait même des différences dans chacune de ces phases de jeu en fonction du poste.
Offensivement, les ailiers réalisent plus de course à haute intensité que les autres postes de jeu. Pour la défense, on peut voir une grande différence entre les n°3 bas (Center Back) qui réalisent le plus de distance à faible intensité contrairement au n°3 haut (Front Center Back) qui couvrent le plus de distance à haute intensité.
Les différences entre les postes ne s’arrêtent pas aux déplacements des joueurs.
En effet, dans leur méta-analyse, Karcher et Buchheit (2014) montrent une différence sur le nombre de tir effectué par match en fonction des postes (Demi-centre 7,4 tirs/match/joueur ; Arrière 9,9 tirs/match/joueur ; Pivot 5,2 tirs/match/joueur ; Ailier 5,5 tirs/match/joueur).
Toujours selon cette méta-analyse, un joueur effectue en moyenne 7,13 tirs/match si on ne prend pas en compte son poste de jeu.
En 2015, Michalsik et Aagaard ont mis en relation le nombre de tir dans un match avec le pourcentage de chance de marquer un but. Ils ont trouvé que 45% des tirs effectués au cours d’un match amènent à un but.
Les actions de tirs et leurs chances de réussite influencent grandement le résultat final d’un match de handball. En effet, lors d’un match, c’est l’équipe qui marque plus de but que son adversaire qui remporte le match.
Ces données de réussite au tir sont à mettre en relation avec les données anthropométriques des joueurs de handball ainsi que la taille du terrain.
Lorsqu’une équipe est en défense, elle se regroupe dans sa moitié de terrain (un carré de 20 m de côté avec une zone de 6 m autour des cages dans laquelle aucun joueur ne peut pénétrer hormis le gardien de but).
Les attaquants qui ont pour objectif de marquer un but sont contraints de manipuler et de déplacer les défenseurs afin d’accéder à la zone de but entre deux défenseurs, ou bien de tirer par-dessus la ligne défensive.
Mais à haut-niveau, les espaces entre deux défenseurs sont restreints. Effectivement, si l’on regarde l’étude de Schwesig et collaborateurs (2017), le profil moyen du joueur de handball en 1ère division allemande est de 96,6 kg pour 1,92 m.
Chez les jeunes : même constat, les joueurs sont de grande taille. Dans l’étude de Aloui et collaborateurs (2019) sur des jeunes handballeurs de 18 ans, le profil moyen des joueurs est de 81,1 kg pour 1,82 m.
Cela se traduit sur le terrain et dans le jeu par moins d’espace entre les défenseurs et favorise les tirs de plus loin en extension au-dessus de la défense.
Dans ces situations, les joueurs sont loin du but (au-delà de 9 m) et doivent parvenir à tromper le gardien de but. Plus leur vitesse de tir sera importante, moins le gardien aura le temps de réagir pour stopper le ballon.
Le tir au Handball
Dans cette étude nous allons nous intéresser aux tirs et à leur vitesse. Tout d’abord nous allons analyser biomécaniquement le geste de tir au handball.
Cette action peut se décomposer en quatre phases. La phase d’élan qui va préparer et organiser le joueur à son action de tir.
Au handball elle est de trois pas maximum à partir du moment où le joueur réceptionne le ballon. Vient ensuite la phase d’armer durant lequel le bras et le ballon vont s’élever au-dessus de la tête et passer à l’arrière du corps.
Durant cette phase, on peut voir une rotation du tronc et des épaules, une abduction et une rotation externe de l’humérus.
La troisième phase est la phase de tir qui consiste à propulser le ballon vers l’avant. Elle réalise le mouvement inverse de la phase d’armer, c’est-à-dire une rotation inverse du buste et des épaules, une adduction du bras et une rotation interne de l’humérus.
Puis, on peut observer une flexion suivie d’une extension de l’avant-bras. Juste avant la propulsion de la balle, on peut voir une flexion du poignet pour accompagner la balle.
Le mouvement se finit par une phase de décélération du bras qui intervient dès que le joueur lâche la balle.
Sur la plan musculaire
Sur le plan musculaire, nous pouvons identifier une activation des muscles abdominaux, lombaires et les différents muscles autour de l’articulation acromio-scapulaire.
Lors de la phase d’armer, la rotation externe d’épaule est réalisée par le sous-épineux, le petit rond et le deltoïde.
L’abduction et la rotation externe du bras sont guidées par l’action du grand dorsal, du deltoïde, du sus-épineux qui permettent d’amener le bras vers l’arrière.
Dans le même temps, le trapèze, l’angulaire, le grand dentelé et le rhomboïde viennent fixer la scapula (sonnette interne) vers la colonne vertébrale afin d’optimiser le geste.
Pour la phase de tir, la rotation interne de l’humérus est guidée par l’action du grand rond et du trapèze. En même temps, le bras est ramené vers l’avant par le grand pectoral et le deltoïde antérieur.
La flexion de l’avant-bras est induite par l’action du biceps brachial, du brachial antérieur et du long supinateur. L’extension de l’avant-bras est quant à elle réalisée par le triceps brachial.
Pour ce qui est de la flexion du poignet, elle est induite par l’activation du grand palmaire, des fléchisseurs des doigts et du poignet.
En effet c’est la succession des différentes phases du tir qui le rendent efficace, rapide et précis. Le tireur doit donc avoir une bonne coordination sur ce geste de tir afin d’être capable, en situation de match, de le reproduire de nombreuses fois dans les meilleures conditions possibles.
Dans cette étude, les sujets sont des joueurs du pôle espoir Occitanie de Handball. Ils ont tous de nombreuses années de pratique derrière eux. Leur technique de tir peut donc être considérée comme automatisée et leur mouvement reproductible sans grande différence.
La vitesse du tir au Handball
Maintenant que nous avons étudié la cinématique du tir au handball, nous pouvons nous intéresser à la vitesse du tir et plus précisément à la vitesse de la balle.
Celle-ci résulte essentiellement de la force générée par les muscles mis en action dans le mouvement. En effet, l’étude de Marques et collaborateurs (2007) a montré une relation importante entre la vitesse de projection et la force maximale du haut du corps.
En 2004, Van den Tillaar et Ettema ont montré que 67% de la vitesse de tir est expliquée par la somme de la vitesse d’extension du coude et de la rotation interne de l’épaule.
Afin d’obtenir une vitesse de tir la plus élevée possible, il convient de réaliser une séquence de mouvement suivant une logique proximo-distale (Jöris et al., 1985).
En effet, on retrouve cette coordination motrice dans de nombreuses activités de lancer au-dessus de l’épaule tel que le baseball, le javelot.
Selon cette approche proximo-distale cela voudrait dire que les segments les plus proches du tronc seraient mobilisés en premier avant les segments distaux.
L’étude de Fradet et collaborateurs (2004) remet en cause cette théorie du recrutement proximo-distale lors du tir au handball. Cette étude a mis en évidence que la vitesse linéaire maximale de l’épaule survient après la vitesse linéaire maximale du coude.
En effet, comparativement aux autres sports, le handballeur, lors de son tir doit faire face à des adversaires qu’il doit contourner pour marquer un but.
Cela l’oblige à adapter son geste sur chacune des situations de jeu. La règle du recrutement proximo-distale n’est donc pas toujours observée lors des tirs au handball.
Les différentes formes de tir au Handball
Le tir au handball peut prendre plusieurs formes : il peut être réalisé à l’arrêt, les appuis ancrés dans le sol ou bien lancé.
En effet, les règles autorisent trois pas maximum balle en main. Ortega-Becerra et collaborateurs (2018) ont montré que l’entraînement en force amène à une augmentation de la vitesse de tir au handball.
Et ce, peu importe que l’entraînement en force soit réalisé sur les membres inférieurs ou supérieurs. Cela peut s’expliquer par l’élan pris avant le lancer, ainsi que par le transfert de force entre les membres inférieurs et supérieurs lors de l’action de tir.
Selon ces auteurs, il est donc important d’intégrer des programmes de force dans l’entraînement des jeunes joueurs de handball. Aloui et coll. (2019) ont mis en place un protocole d’entraînement avec bandes élastiques sur le haut du corps afin d’observer ces effets sur la vitesse de lancer.
Leurs résultats ont montré une amélioration plus importante de la puissance pic lors du lancer, de la force sur le 1RM au développé couché ainsi qu’une amélioration de la vitesse de tir que ce soit en mouvement ou en statique.
Ils concluent alors qu’un entraînement en force et en puissance sur le haut du corps permet d’augmenter la vitesse de shoot. Marques et coll. (2007) ont étudié la relation entre la force, la puissance musculaire et la vitesse de tir.
Leurs résultats n’ont pas montré de corrélation significative entre la vitesse du ballon et la force maximale sur le développé couché. La corrélation entre le 1RM sur le développé couché et la vitesse de tir est de r = 0.64.
Cependant, dans leur étude, ils ont uniquement testé la phase concentrique du développé couché. Ce protocole peut être questionné, car il ne fait pas intervenir le cycle-étirement détente, alors que le tir au handball est un mouvement qui sollicite l’énergie élastique des muscles.
Intérêts du développé couché au Handball ?
On peut donc se questionner sur l’efficacité du développé couché sur la vitesse de tir en utilisant le mouvement complet : excentrique et concentrique.
En effet le développé couché est un mouvement durant lequel les muscles actifs sont similaires aux muscles actifs lors de la phase de lancer. Rodríguez-Ridao et coll. (2020) ont montré l’activation du grand pectoral, du deltoïde antérieur et de la tête médial du triceps brachial lors du mouvement de développé couché.
Enfin, l’étude de Hermassi et coll. (2015) nous montre qu’un entraînement en puissance à l’aide de lancers de medecine ball permet d’augmenter la vitesse de tir.
Après cette revue de littérature, on peut donc se questionner sur les effets de divers entraînements en développé couché sur la vitesse de tir au handball.
Le but de l’étude est de déterminer quelle forme de travail sur le développé couché pourrait être la plus efficace dans le développement de la vitesse de tir chez les handballeurs.
Pour cela, 15 joueurs du pôle espoir de handball ont été répartis en deux groupes expérimentaux : groupe force (GF) et groupe puissance (GP).
Nous avons donc voulu déterminer si (1) l’entraînement en développé couché entraine une amélioration de la vitesse de tir au handball ; et si (2) les deux groupes d’entraînement auront des gains similaires en vitesse de tir.
Pour télécharger le mémoire de Corentin en intégralité :
Corentin PIC
Références
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