Sommaire
Introduction
L’hormone de croissance, ou growth hormone (GH) en anglais, est une hormone peptidique composée de 191 acides aminés, produite et sécrétée au niveau de la partie antérieure de l’hypophyse.
L’hormone de croissance a été extraite pour la première fois dans un hypophyse humain autour des années 1940 et a rapidement démontré des effets spectaculaires afin de traiter certaines pathologies comme le nanisme dans les années 1950 (1 ; 2).
Son usage a dérivé vers des fins de performance, popularisé notamment en bodybuilding vers 1980 suite à l’ouvrage de Daniel Duchaine « Underground Steroid Handbook », considéré alors comme une véritable bible du dopage (3).
Production endogène
Comme susmentionné, l’hormone de croissance est produite et sécrétée par les cellules somatotropes situées dans la partie antérieure de l’hypophyse.
Cette production n’est pas continue mais a plutôt une tendance dite « pulsatile » avec des pics lors de certaine période, notamment la nuit. Également, des différences de sécrétion existent entre l’homme et la femme (voir figure ci-dessous)
Cette sécrétion est régulée via l’hormone GH-releasing (GHRH) ainsi que la somatostatine (4).
De plus, l’hormone de croissance stimule la sécrétion de l’IGF-1 dans pratiquement tous les tissus, en particulier au niveau du foie (5).
En effet, la majorité des tissus disposent de récepteurs à l’hormone de croissance, permettant à cette hormone d’avoir un effet à travers l’ensemble du corps de manière pléiotrope.
Enfin, l’hormone de croissance et l’IGF-1 entraîne un rétrocontrôle « négatif » sur leur production lorsqu’elles sont présentes en trop grande quantité à l’intérieur du corps (6). En revanche, le sommeil, l’activité physique ou encore un certain peptide gastro-intestinal permettent de stimuler cette sécrétion.
Dans le présent article, il ne sera question que des effets de l’hormone de croissance au niveau musculaire.
Régulation de l’hypertrophie musculaire par l’hormone de croissance et l’IGF-1
D’une manière simplifiée, l’hypertrophie musculaire a lieu lorsque la synthèse protéique et les processus métaboliques associés sont en faveur de l’anabolisme (permettant la création).
Il est établi que les changements au niveau de la sécrétion de l’hormone de croissance et d’IGF-1 font varier cette synthèse protéique et jouent un rôle important dans les processus d’hypertrophie.
En effet, l’hormone de croissance permet des effets au sein des tissus via deux mécanismes : un étant dépendant de l’IGF-1, l’autre étant indépendant de l’IGF-1 (7).
Concernant le mécanisme dépendant, l’IGF-1 permet l’augmentation de la synthèse protéique via l’amplification d’expression au niveau des voies de signalisation PI3K/Akt et par la MAPK (ERK1, ERK2) (8).
Quant au mécanisme indépendant, l’hormone de croissance est capable d’induire d’elle-même une augmentation des processus anaboliques concernant la synthèse protéique sur l’ensemble des tissus musculaires via le facteur de transcription STAT5 (Signal Transducer and Activator of Transcription 5) et la voie de signalisation JAK/STAT (8).
Administration d’hormone de croissance et d’IGF-1 lors de déficience
L’administration d’hormone de croissance durant 2 à 4 semaines a permis à des personnes déficientes d’augmenter leur synthèse protéique ainsi que leur masse maigre.
Cependant, une administration d’hormone de croissance sur 6 mois a démontré un retour à la normale de la balance protéique ainsi qu’une augmentation de la masse maigre des viscères (et non du muscle squelettique), pouvant être très pathologique par la suite.
En effet, d’une manière générale, l’hormone de croissance améliore et augmente les processus anaboliques au niveau des muscles squelettiques. Néanmoins, son abus et un traitement sur le long terme entraîne une hypertrophie des muscles lisses, donnant un effet de ventre gonflé appelé aussi « palumboïsme » et potentiellement des complications adjacentes telle que l’acromégalie.
Cette tendance d’un effet bénéfique sur le court terme se retrouve pour l’administration d’IGF-1.
Effectivement, si elle permet d’améliorer la synthèse protéique à des faibles doses, l’abus engendre l’effet inverse chez des femmes post-ménopausée avec une absence d’augmentation de la masse maigre (9).
Fait intéressant, il est établi que le gène de l’IGF-1 présent dans les muscles squelettiques peut produire trois types d’IGF-1 (e.g., IGF-1Ea, IGF-1Eb et IGF-1Ec) (10).
Chez des jeunes garçons, l’administration d’hormone de croissance permet d’augmenter les niveaux du mARN d’IGF-1Ea hépatique et de concentration systémique d’IGF-1, à l’exclusion des niveaux d’IGF-1s au niveau local dans les muscles squelettiques (11).
Dès lors, ces résultats questionnent les chercheurs quant aux effets d’une augmentation locale via une administration au niveau des muscles squelettiques, laquelle pourrait jouer un rôle significatif dans l’hypertrophie. A ce propos, des études sont nécessaires afin d’investiguer les relations entre hypertrophie musculaire et concentration d’IGF-1s locale et systémique (8).
Effets de l’administration d’hormone de croissance avec un entraînement en résistance
Les effets d’une telle administration, généralement chez des sujets jeunes et en bonne santé, ne sont pas bien documentés scientifiquement.
Cependant, Yarasheki et ses collaborateurs ont conduit une étude visant à étudier l’effet d’une administration d’hormone de croissance (40 mcg/kg/jour environ 9.6 UI/jour) durant 12 semaines chez des sujets expérimentés en musculation, couplée à un entraînement en résistance (12).
Ils ont observé une augmentation de la masse maigre et de la synthèse protéique du corps en globalité.
Cependant, aucun effet significatif sur la synthèse protéique des muscles squelettiques, la force musculaire ainsi que l’aire de surface de section du muscle n’a été observé entre le groupe contrôle et le groupe « supplémenté » en hormone de croissance.
Dans une autre étude portant sur une administration d’hormone de croissance sur 8 semaines (6 UI/jour) vs placebo, des chercheurs ont observé une réduction de la masse grasse, une augmentation de la masse maigre et une augmentation de la performance en sprint de manière significative (13).
Toutefois, ces différences s’estompent après 6 semaines d’arrêt (13)
Malgré de faibles évidences scientifiques sur une augmentation de l’hypertrophie ou de la force musculaire de façon significative due à une administration exogène d’hormone de croissance, beaucoup d’athlètes en utilisent.
Un point important est à rappeler ici : les études scientifiques tiennent uniquement compte de l’administration d’hormone de croissance seule. Or dans les sports de haut niveau, celle-ci est généralement couplée avec d’autres substances anabolisantes permettant d’en amplifier les effets. Mais, vous vous en doutez, la recherche scientifique sur ce sujet est extrêmement faible.
Plusieurs discussions sur les forums « underground » mettent en avant que l’hormone de croissance permet d’améliorer la récupération et de prévenir les blessures en plus d’accroître les effets des anabolisants.
A ce propos, l’injection locale d’hormone de croissance permet d’augmenter les niveaux de collagène dans les tendons chez les jeunes et les aînés, directement et indirectement via la circulation systémique et locale (14 ; 16).
De plus, une administration d’hormone de croissance pendant 6 semaines a permis d’améliorer significativement les marqueurs de récupération au niveau des tendons, avec un tendon devenu plus épais et plus raide (17 ; 18).
Administration d’IGF-1 couplée à un entraînement en résistance
L’IGF-1 est un médiateur important de la croissance musculaire durant la phase embryonnaire et l’adolescence.
D’ailleurs, les animaux transgéniques qui produisent trop d’IGF-1 augmentent leur capacité de régénération musculaire (19 ; 20) et le transfert des gènes humains d’IGF-1. Le vecteur retroviral chez la souris promeut l’hypertrophie musculaire in vitro (21).
Couplé à un entrainement en résistance, ce transfert permet aux souris d’augmenter leur masse musculaire de façon significative (22).
Fait intéressant, des études mettent en avant que les concentrations en IGF-1 augmentent après un entrainement en résistance (3).
Toutefois, la recherche sur l’administration d’IGF-1 n’est pas dense et très rares sont les études traitant de ces effets sur les humains.
Effets secondaires potentiels
Des concentrations supra physiologiques en hormone de croissance et en IGF-1 résultant d’une administration exogène ne sont pas encore bien compris.
Basée sur les études animales, l’acromégalie est un effet secondaire potentiel assez courant lorsque les doses d’administration sont élevées.
Sur le long terme, le risque de diabète de type 2 est également élevé car l’hormone de croissance diminue la sensibilité à l’insuline et la tolérance au glucose.
D’autres effets secondaires, tels que la réduction de la fonction cardiaque, l’apnée du sommeil, l’hypertension intracranienne et la viscéromegalie sont reportés (23).
Egalement, les bodybuilders utilisant de l’hormone de croissance peuvent être confrontés à une augmentation du volume des muscles lisses (viscères) entraînant de facto un ventre à l’aspect très gonflé.
Enfin, dans de nombreuses études (et non l’intégralité des études menées à ce propos (24)), l’administration d’hormone de croissance et d’IGF-1 augmente le risque de développer des tumeurs. En effet, leurs effets mitogénique et anti apoptotique augmentent le risque de cancer (25).
Sécrétion autocrine et paracrine de facteurs de croissance
Des hypothèses émergent quant à une régulation de l’hypertrophie musculaire par la sécrétion d’IGF-1 locale (autocrine / paracrine), plutôt que par une concentration systémique (26).
En effet, plusieurs « experts » en bodybuilding témoignent sur des forums et des blogs, relatant qu’une administration exogène d’IGF-1 intra musculaire peut augmenter localement la croissance musculaire.
Cependant, aucune recherche ne s’est penchée sur le sujet pour affimer – ou non – ces dires.
Toutefois, des études ont démontré qu’un variant d’IGF-1, nommé MGF et retrouvé dans les muscles squelettiques, était activé après un entrainement en résistance et permettait d’améliorer la récupération (27).
En effet, des chercheurs ont observé que le MGF augmente l’activation des cellules satellites, leur prolifération ainsi que leur fusion, permettant in fine un phénomène d’hypertrophie (28).
Bien que le MGF soit disponible sur Internet et que ces effets aient été mis en avant sur des sites de bodybuilding, il n’y a actuellement aucun article scientifique traitant des effets de l’administration de MGF couplé à un entrainement en résistance de type musculation.
Conclusion
L’hormone de croissance et les facteurs de croissance associés sont couramment utilisés pour le dopage afin d’améliorer les performances et la croissance musculaire.
De façon intéressante, la recherche scientifique ne s’accorde pas pleinement sur les effets de l’hormone de croissance / IGF-1 relatés sur les divers forums et sites de bodybuilding.
Comme susmentionné, les études scientifiques tiennent compte uniquement de l’administration d’hormone de croissance seule. Or, dans le sport à haut niveau, l’hormone de croissance est souvent couplée avec d’autres substances anabolisantes.
Axel NIERDING
Pour approfondir
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Références
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