renforcement musculaire excentrique

Le renforcement musculaire en excentrique

Cet article fait référence à l’introduction du mémoire de Migüel ARMANGAU réalisé du son Master II STAPS – EOPS à l’Université de Montpellier (2022/2023)

Titre du mémoire : Importance des adaptations des ischio-jambiers sur appareil excentrique dans la force au squat

Le renforcement musculaire en excentrique

Après une analyse approfondie des différentes modalités de renforcement musculaire, il a été choisi de stimuler les ischio-jambiers par de l’« Excentrique » (modalité d’action musculaire où son insertion distale s’éloigne de son insertion proximale) aussi appelée « la contraction musculaire excentrique », ou « l’activation musculaire excentrique » selon Lindstedt (2001).

Il faut considérer que l’action musculaire est excentrique lorsque que le complexe tissulo-musculo-conjonctif doit lutter contre une force supérieure à ce qu’il peut produire, cela induit un allongement des fibres musculaire et du tissu conjonctif forcé (Lindstedt, LaStayo, et Reich 2001). 

Le travail excentrique est aussi appelé travail musculaire « négatif » dans le sens où le mouvement résultant : éloignement des extrémités de l’articulation musculaire concernée, se réalise dans le sens inverse (vectoriel) de la contraction musculaire concentrique : rapprochement des insertions musculaires (Abbott, Bigland, et Ritchie 1952). 

contraction excentrique renforcement musculaire
Contraction excentrique

Renforcement musculaire : autres modes de contractions

Les méthodes de musculation en excentrique sont des méthodes de travail intéressantes autant pour la création de force que pour l’hypertrophie (Schoenfeld et al. 2017).

Cette modalité de contraction est assez particulière car elle est éloignée du point de vue mécanique et physiologique des deux autres modes de contractions musculaires connue :

La contraction musculaire « concentrique » (modalité d’action musculaire permettant de rapprocher son insertion distale vers la proximale) et la contraction musculaire « isométrique » (modalité d’action musculaire ou la distance entre ses insertions proximales et distales ne varient pas) (Barash et al. 2004; Kostek et al. 2007; Chen, 2003).  

les différents régimes de contraction musculaire concentrique isométrique excentrique pour le renforcement musculaire
Les différents régimes de contraction

L’excentrique fait intervenir des mécanismes qui lui sont propre telle que l’activation de gènes spécifiques qui ne sont pas stimulés lors des autres modes de contractions . Il existe énormément d’adaptations structurelles et physiologiques du complexe musculo-tendineux à la stimulation musculaire excentrique dont celle de l’augmentation de la force qui servira pour cette étude.

Cela rend les méthodes de travails musculaires par excentrique très efficace mais singulière à mettre en place (Hody et al. 2019).

Renforcement musculaire : avantages du protocole excentrique

L’étude a pour but de démontrer l’efficacité d’un protocole excentrique pour le renforcement musculaire des ischio-jambiers et des fessiers. Utiliser un protocole de renforcement musculaire permet une économie d’énergie induite par ce mode de contraction, en effet moins coûteuse qu’une contraction musculaire concentrique. 

Les travaux de Abbott, Bigland, et Ritchie (1952) ont mit en exergue un coût énergétique réduit de plus ou moins 4 à 6 fois par rapport à une contraction concentrique (Isner-Horobeti et al. 2013; Abbott, Bigland, et Ritchie 1952). 

L’avantage de l’exercice excentrique réside dans l’existence de structures moléculaires qui sont sollicitées lors de l’action excentrique du tissu conjonctif de la matrice extracellulaire (muscles, fascias) grâce aux « fibres élastiques » qui les composent : l’élastine, l’élaunine et/ou l’oxytalane (Ochala et al. 2011).

Le type de fibres musculaires influe sur cette capacité d’accumulation d’énergie au sein du muscle dû à sa teneur en titine (protéine musculaire responsable de l’élasticité musculaire) qui les composent. Les fibres de types I plus riches en titine accumulent et restituent le plus d’énergie (Horowits, 1992 (p396)).

Mécanique de l’exercice en excentrique

L’excentrique est le travail préparatoire à la contraction concentrique (Abbott, Bigland, et Ritchie 1952). Grâce au travail en excentrique, on peut donc accumuler une quantité de travail à effectuer. 

L’utilisation de l’excentrique dans le cas du renforcement musculaire est plus intéressante, cette économie d’énergie permet d’effectuer plus de renforcement avec un faible impact sur la dynamique de charge des entrainements (Isner-Horobeti et al. 2013; Vogt et Hoppeler 2014).

Le coût énergétique plus faible est mis en avant par (Caremani et al. 2019; Piazzesi et al. 2014; Brunello et al. 2014; Bang et al. 2009; Reconditi et al. 2014; Fusi et al. 2010; Ishijima et al. 1991). 

En effet lorsque l’on tire sur le sarcomère, les têtes de myosines qui sont en paires et qui ne s’accrochent pas de concert quand le muscle est activé, viennent dans ce cas particulier se fixer tous les deux sur le filament d’actine (Fusi et al. 2010; Brunello et al. 2014; Piazzesi et al. 2014; Reconditi et al. 2014).

De plus lors d’un cycle de phosphorylation des têtes de myosines pour attacher et détacher celles-ci des filaments d’actines, il faut hydrolyser 1’ATP seulement soumise à un stress mécanique.

Celles-ci se détachent par la force qui leur est appliquée et restent activés dans leurs formes d’ancrage, ce demi-cycle d’activation de la myosine peut se reproduire 6 à 7 fois selon Ishijima et al. (1991) avant que le cycle ne se termine par le décrochage définitif de la fonction d’ancrage de la tête de myosine (Ishijima et al. 1991).

cellule musculaire lors du renforcement musculaire

Effets indésirables de l’excentrique en lourd

L’excentrique est principalement utilisé dans la préparation physique lors de la recherche du développement de la force maximale, dans sa version « lourde » c’est-à-dire que l’intensité de l’exercice est comprise entre ±90 et 130%(Isner-Horobeti et al. 2013).

Cependant, cette modalité d’entraînement peut produire des conséquences néfastes pour l’organisme, une incapacité ou des blessures . En effet le muscle subit des dommages sur sa structure qui sont des « micro-déchirures », car l’utilisation du travail en excentrique apporte un stress mécanique supérieur aux autres méthodes (Fridén et Lieber 1992).

Ces dommages s’expliquent par le fait que les sarcomères ou demi-sarcomères ne sont pas tous exactement de la même taille (Talbot et Morgan 1998). Lors des efforts à fortes tensions d’étirements, les sarcomères les plus courts seraient éclatés car ils absorberaient en premier la force d’étirement (Talbot et Morgan 1998).

On explique ainsi que les exercices à forte amplitude excentrique causent plus de dommages que les exercices raccourcissant les sarcomères (Lieber et Fridén 1993.). Les dommages ont été vérifiés par l’augmentation de la concentration sanguine de protéines normalement présentes dans le cytoplasme des cellules musculaires : « immunoglobuline » (Clarkson et Hubal 2002; McNeil et Khakee 1992.). Cette porosité accrue a été vérifiée sur le rat grâce à une coloration de ses cellules musculaires au bleu d’Evans (Hamer et al. 2002). 

Cela crée donc des dommages spécifiques à l’excentrique qui peuvent causer des incapacités ou des blessures lors des entraînements appelée « DOMS » (Douleurs musculaires d’apparitions retardées) dû à la présence d’« EIMD » (dommage musculaire induit par l’exercice)  supérieur en excentrique qu’en concentrique (Nosaka, Newton, et Sacco 2002).

Il est important de comprendre à quoi sont dû ces effets indésirables pour proposer la modalité de travail excentrique la moins traumatisante pour les sujets de l’expérience (Hody et al. 2019). Ces douleurs ont récemment été attribuées au fait que lors du développement musculaire, le « NGF » (facteur de croissance neuromusculaire) provoque de la douleur (Turrini et al. 2002). 

De plus il semblerait que les DOMS soit un indicateur d’un risque accru de blessures dû au travail en excentrique (Damas et al. 2016). Mais la blessure souvent causée par le départ des DOMS, les athlètes ne sentant plus de douleurs, reprennent une activité sportive sans retenue alors qu’il existe un pouls d’une dizaine d’heures entre la disparition des DOMS et de celle des EIMD (Cheung, Hume, et Maxwell 2003). 

renforcement musculaire exercice excentrique lourd

L’excentrique modéré

Nous nous sommes alors intéressés à la modalité de travail en excentrique nommé « excentrique modéré ». Il apparaît que grâce à l’utilisation de celle-ci on bénéficie d’un maximum des bienfaits du travail en excentrique, en limitant au maximum les conséquences néfastes de son utilisation en version « lourde » (Hody et al. 2019).

Dans le cas de notre expérience, l’excentrique à charge modérée doit apporter des améliorations pour le squat au travers d’une meilleure coordination qui traduit un passage plus rapide du point critique au niveau de l’articulation des genoux cuisse parallèle au sol. 

Renforcement musculaire : l’excentrique modéré

Le travail musculaire excentrique « modéré » permet aussi un remodelage des tissus conjoncto-musculaire (Schoenfeld et al. 2017; Brughelli et Cronin 2007). Les effets bénéfiques de l’excentrique modéré sont expliqués par le fait que lors d’une activation musculaire excentrique, la force produite par les sarcomères augmente, ce qui permet de réaliser les mouvements avec moins d’unités motrices (Hoppeler, 2016).

Le contrôle du mouvement se complexifie forçant les unités motrices à produire un contrôle plus fin sur le mouvement à la différence d’un exercice en concentrique où le nombre maximal d’unités motrices pouvant être recrutées sont activées (Hoppeler et Herzog 2014; Hoppeler 2016).

Les pratiquants de sports dynamophiles sont aussi sujets à des douleurs et blessures au niveaux des articulations des genoux et des hanches car les contraintes exercées sur ces articulations sont très importantes (Graci et Salsich 2015). Avec une première explication de la douleur par le fait qu’un mauvais contrôle des articulations genoux et hanches entraîne un valgus interne lors de la flexion de jambe parfaitement corrélé avec la perception de la douleur (Graci et Salsich 2015).

Un meilleur contrôle moteur de ces articulations pourrait apporter un effet bénéfique sur la douleur perçue lors du mouvement (Graci et Salsich 2015; Amarantini, Rao, et Berton 2010). L’excentrique qui accroit la libération de facteurs de croissances musculaires et tendineux permet un renforcement structurel du muscle bien plus important que le travail en concentrique (Blazevich et al. 2007).

La libération des facteurs de croissances musculaires amplifie les bénéfices des exercices utilisés lorsqu’ils sont effectués en excentrique comparé au concentrique ou à l’isométrique (Roig et al. 2009). Cette modification structurelle rend selon certains auteurs le muscle et les tendons plus « gros » ce qui en résulte selon eux un complexe musculo-tendineux plus résistant face aux forces de tension et la blessure (Howell, Chleboun, et Conatser 1993; Reich et al. 2000). 

Il a été montré que le travail en excentrique active des senseurs spécifiques responsables de ces modifications structurel (Pedersen 2012). Parmi les nombreuses adaptions spécifiques excentrique et concentrique (Franchi, Reeves, et Narici 2017), rapporte que le fait de réaliser ses exercices en excentrique ont tendance à activer certains gènes tels que ceux du domaine de « LIMs » (gènes codants pour les adaptations neuromusculaires) agissant entre autres sur la division cellulaire et le développement des motoneurones (Barash et al. 2004).

Le stress mécanique plus important que les autres modalités de contraction musculaire induite par l’exercice exacerbe la réponse inflammatoire notamment par une plus forte concentration en cachexines telle que le TNFα (Facteur de nécrose tumorale) qui induit une apoptose musculaire accrue dans le cas étudié (Coffey et Hawley, 2007).

La réponse inflammatoire supérieure de l’excentrique vis-à-vis des autres modalités de contraction augmente donc les adaptations induites à l’exercice, à condition que celle-ci ne submerge pas les mécanismes de réponse immunitaire (Hentzen et al. 2006) et prenne en compte sa durée de récupération (jusqu’à 96h après la stimulation excentrique <> 12 à 24h pour le concentrique) (Neubauer et al. 2014).

Il ne faut pas chercher à atténuer cette réponse inflammatoire chez le sportif sain (ne sortant pas de blessure) car elle permet les adaptations physiologiques supérieure au concentrique (Paulsen et al. 2012).

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Utilisation de l’excentrique à « charges modérées »

L’excentrique à charge modéré permet donc d’obtenir des effets bénéfiques lors des entrainements et des effets bénéfiques dans la durée (Hoppeler, 2016), en limitant les inconvénients tels que les DOMS et EIMD pouvant causer la blessure. L’exercice musculaire en excentrique peut prévenir la blessure (Schoenfeld et al. 2017), ou participer à la réhabilitation musculaire (Escamilla, 2001).

Cependant les remodelages musculaires sont lents et l’athlète doit accumuler une quantité de travail importante (Hoppeler, 2016). L’ischémie induite par l’excentrique, amplifiée par les effets répétés du protocole que nous avons proposé (pédalage sur Musclus pourrait apporter des bénéfices hautement plus important qu’un travail en excentrique traditionnel (Turrini et al. 2002).

Les adaptations musculaires seront intéressantes à transférer lors de la pratique du squat, notamment par le fait que le travail excentrique est supérieur en efficacité comparé à un travail concentrique. De plus il modifie la relation des couples musculaires de l’articulation sollicitée (Mjølsnes et al. 2004).


Pour rappel, le présent article fait référence à l’introduction du mémoire. Pour plus d’informations, n’hésitez pas à vous adresser directement à l’auteur ci-dessous.

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Migüel ARMANGAU

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Références

Les références de l’article sont présentes sur la première partie de l’introduction traitant du squat.

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